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Critiques de Stephen Graham Jones (94)
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Un bon indien est un indien mort

°°° Rentrée littéraire 2022 # 30 °°°



Lors d'une partie de chasse illégale dans le Montana, quatre jeunes autochtones Blackfeet ont massacré un troupeau de caribous sur un territoire réservé aux anciens, et notamment une femelle gestante qui s'acharne à ne pas mourir pour défendre son veau embryon, avant de rendre l'âme . Dix ans après, les chasseurs sont devenus des proies. Une entité vengeresse veut les affronter les uns après les autres, protéiforme, capable de ruses et métamorphoses dont la principale est la femme-à-tête-de-caribou.



Le titre ironique détournant l'aphorisme raciste du général Sheridan ne laisse aucune place au doute, ça va dépoter sévère. Et ça va saigner ! du prologue ( dézinguant un des quatre gus ) au terrifiant match de basket final, comme dans une cascade de dominos, chaque partie vient percuter la précédente pour compléter le jeu de massacre.



«  La maison qui coulait rouge », le chapitre consacré à Lewis est juste exceptionnel. L'auteur nous colle à lui. Nous voyons ce qu'il voit, sans aucun autre point de vue pour desserrer l'angoisse qui monte : d'abord malaise, puis insidieuse paranoïa érodant sa santé mentale, puis hallucinations mortifères jusqu'à sombrer dans la folie et le chaos. Lewis était le seul des comparses à comprendre l'origine de la menace qui s'abat sur eux. Lorsqu'on suit les autres, la tension naît de ce qu'on sait, de ce qu'on devine, alors que leur ignorance les rend encore plus impuissants à affronter l'esprit vengeur.



La comparaison avec Stephen King est assez évidente tant Stephen Graham Jones maitrise les codes du fantastique, de l'horrifique et du slasher. Il ne craint pas de faire basculer des paragraphes dans la violence explicite et le gore, tout en faisant preuve de finesse suggestive pour développer une atmosphère troublante. L'étrangeté et les ténèbres s'infiltrent brillamment partout, dans le moindre recoin du texte avant de tout recouvrir, enrobé d'un humour très noir ( forcément ), très xième degré qui ravira les amateurs du genre.



Mais Un bon indien est un indien mort est bien plus qu'une histoire qui fait peur. le recours au fantastique s'entrelace au réel pour amplifier l'intrigue, mais également pour confronter avec force le lecteur à la réalité de la condition amérindienne contemporaine.



Stephen Graham Jones s'empare du trope de la malédiction indienne pour l'inverser et mieux interroger l'éternel hiatus entre tradition et modernité, à la façon d'un Tommy Orange. Les quatre personnages ont perdu les codes de la culture traditionnelle blackfeet, ils sont désorientés dans un monde de blanc, surtout Lewis qui a quitté la réserve et vit avec une blanche. En massacrant un troupeau de caribous juste pour le fun, ils ont commis le même type de péché que les Blancs ont commis contre leurs ancêtres au XIXème siècle : une violence aveugle et inutile qui ne peut qu'engendrer une profonde culpabilité.



Comment mettre fin au cycle de la violence ? Ce n'est pas anodin que la lumière vienne d'une adolescente, Denorah, la fille d'un des quatre, extraordinaire personnage qui fait mentir tous les habituels attributs virils des slashers en cherchant une issue en utilisant la compassion comme arme la plus redoutable plutôt que la vengeance qui s'offrait facilement à elle.



Un roman inclassable à l'énergie surpuissante, d'autant plus réjouissant qu'il a du fond.
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Mon coeur est une tronçonneuse

Proofrock, petite ville de montagne, Idaho. Lorsqu’on fait la connaissance de Jade Daniels, elle n’est pas en grande forme. Adolescente bizarre de dix-sept ans, moitié amérindienne par son père Blackfeet alcoolique et violent, mère absente, elle revient au lycée où elle n’a pas d’amis après une tentative de suicide et deux mois en clinique.



Jade est obsédée par les slashers, catégorie de films d’horreur mettant en scène des tueurs en série ( eux-mêmes appelés slashers ). Et là, elle est persuadée à son retour que quelque chose a changé, qu’un cycle de slasher vient de s’enclencher, va s’abattre sur sa ville et que sa mission est de préparer la future fille finale ( l’ultime rescapée ) qui doit être capacité d’accomplir : découvrir qui sera le tueur masqué et le mettre hors d’état de nuire.



Malgré la narration à la troisième personne, le lecteur est complètement plongée dans la tête de cette jeune fille. Et ce n’est pas facile à suivre car elle voit tout à travers le prisme d’un slasher. Sa connaissance du genre est encyclopédique. Chaque page est remplie de références explicites à des films ( leurs noms sont indiqués ainsi que ceux de leurs personnages principaux, Vendredi 13, Scream, Les Griffes de la nuit, Halloween entre autres ). Il y a mêmes des extraits de ses copies écrites pour un professeur d’histoire, dissertation sur le genre slasher ).



Même si c’est très intelligemment raconté ( et souvent même assez drôle ), cela m’a donné le tournis, écrasée par la rafale de références, étouffée dans les délires logorrhéiques de Jade, perdue dans la perception de la réalité tant Jade semble fantasmer non stop sur la survenue d’un slasher dans sa ville … alors que le roman s’est justement ouvert sur la mort mystérieuse d’un couple de Hollandais venus se baigner dans le lac de la commune … sur lequel plane une légende horrifique liée à une sorcière indienne …



Bref, c’est un défi de faire le tri entre ce qui relève de la réalité et des fantasmes de Jade tant la narration ne fixe aucune frontière nette. Je pense également que le roman aurait gagné à être plus resserré pour éviter de nombreuses situations répétitives ni faire tanguer le lecteur dans ce récit poreux qui oscille entre réalité et fantasme sans réellement fixer de frontière.



Mais voilà, Jade Daniels est une formidable héroïne, une de celles qui vous marquent et vous tiennent par la main pour vous ramener à elle quand vous êtes perdu dans le texte. Au fur et à mesure que l’intrigue avance, on se rend compte qu’elle utilise les films d’horreur comme des boucliers contre le monde, que son amour pour les slashers est en fait une mécanique de défense pour se protéger d’une réalité vraiment laide et cruelle.



Derrière cette histoire quelque peu délirante, se dessine le portrait intime et surprenant d’une petite fille effrayée, en colère, qui veut survivre aux traumatismes qu’elle a subis, dépassée par ses émotions au point de se réfugier dans des films qui assignent un rôle à chacun, obéit à des codes très précis sans s’en écarter, offrant ainsi une vision presque rassurante d’un ordre dans lequel la fille finale l’emporte toujours. Et cela devient bouleversant de voir Jade à se point se dénigrer au point de ne pas imaginer qu’elle puisse être, elle, cette fille finale tant attendue, pure et parfaite.



Et on comprend alors pourquoi Jade aimerait voir crever ses camarades de lycée, son père, les flics, les riches de Terra Nova ( lotissement luxueux en construction sur un ancien cimetière indien, occasion pour l’auteur de parler des inégalités sociales, des discriminations, des prédations capitalistiques etc )

Autant j’ai trouvé la première moitié du roman bien longues, autant les cinquante dernières sont justes géniales : spectaculaires en jouant avec les tropes des slashers, pleine de surprises et de rebondissements, et au final émouvantes.
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Galeux

C’est mon coup de cœur récent pour le dernier roman de Stephen Graham Jones, Un bon indien est un indien mort, qui m’a amenée à remonter jusqu’à Galeux, son premier roman traduit en France. Toujours dans une veine fantastique mais moins horrifique, le récit est mené essentiellement à la première personne, celle d'un garçon élevé dans une famille itinérante de loups-garous dans l’Amérique d’aujourd’hui, forcés par leur condition à se déplacer dans tout le Sud des Etats-Unis. On les suit des huit au dix-sept ans du garçon. Avec l’adolescence, il voit son corps changer, ses émotions s’exacerber mais ce qu’il attend, c’est de savoir si lui aussi a le gène loup-garou, si lui aussi va se transformer. Son oncle et sa tante sont persuadés que oui, mais la transformation lycanthropique tarde …



Les thèmes de l’appartenance et de l’identité sont omniprésents dans ce roman initiatique. Le garçon est poussé par un désir désespéré de devenir un loup-garou, hanté par la mort de sa mère à sa naissance, mystifié par l’absence d’un père dont on lui cache l’identité, porté par la mémoire d’un grand-père loup-garou plein de formidables histoires à raconter. En attendant sa possible transformation, il écoute les contes et légendes, observe de près sa famille, note tout afin de reprendre le pouvoir sur son histoire. Et petit à petit, il propose au lecteur un véritable guide de survie ou manuel du parfait loup-garou.



L’auteur déconstruit ainsi les clichés à la pleine lune et réinvente complètement le mythe du loup-garou en l’intégrant dans une réalité sociale douloureuse profondément humanisée. C’est ce mélange étonnant de réalisme et de fantastique qui propulse le lecteur dans le récit, même lorsque celui-ci se fait un peu confus et redondant. On découvre ainsi pourquoi les loups-garous ne peuvent pas manger de frites, pourquoi ils ne portent que des jeans, sortent méticuleusement les poubelles le soir, adorent les jeux culturels télévisés et vident consciencieusement leur vessie avant une nuit d’errance.



Les scènes d’action pure et dure sont très cinématographiques, imprimant dans les rétines les formidables scènes de transformation physique à la lisière du body horror. Pour le reste, Stephen Graham Jones cultive un ton tragicomique. Les choses tournent vite mal avec la police lorsque le « sang » prend le contrôle du loup-garou et libère ses pulsions féroces, tant il est difficile de préserver leurs secrets à l’égard des locaux 100% humains, tant il est impossible d’entretenir des relations amicales ou amoureuses avec des personnes que vous pouvez déchiqueter à la moindre explosion émotionnelle.



La forme est divertissante mais le fond chargé. Le recours au fantastique est sali par la crasse de la vraie vie pour dire la douleur d’être « Autre » dans un pays peu accueillant et de plus en plus violent.



« Un loup-garou ne se résume pas à ses crocs et à ses griffes. C’est à l’intérieur. C’est le regard que tu portes sur le monde. C’est le regard que te renvoie le monde. »



On peut remplacer le mot « loup-garou » par « Indien ». La métaphore est limpide. Le loup-garou, c’est l’Amérindien obligé de vivre ou survivre dans un monde moderne construit par les Blancs, devant faire avec l’héritage du traumatisme du génocide culturel passé, tiraillé entre l’acceptation des traditions ou leur refus. Pris au piège en tant que « bâtards » ( le titre originel, « Mongrels » ) alors que ce devrait être formidable de pouvoir habiter deux mondes et de les voir à travers des yeux différents.









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Un bon indien est un indien mort

Responsables d'un massacre de neuf Caribous, (dont une jeune femelle en gestation), un groupe de quatre hommes de la tribu des Blackfeet, sont victimes d'une entité vengeresse, une femme à la tête de Caribou. En effet, cette chasse était interdite par les anciens.



Trois parties absolument horrifiques prônent le contenu de ce roman que je pensais au départ, au vu du titre, une métaphore sur les droits civiques des Natifs. Et Bim!! C'est un fond plus riche que nous offre l'auteur. Ses quatre hommes qui se sont très nettement éloignés de leur tradition, au point de ne plus respecter la vie, vont vivre d'atroces souffrances pour leur rappeler que la nature est au commande. Une leçon de karma bien sanguinaire.



La dernière partie, cette course poursuite dans la neige m'a happé jusqu'au final très émouvant, touchant au plus haut niveau ma sensibilité empathique. Très très bon roman d'horreur que j'ai trouvé très bien écrit. Je ne suis pas rentrée facilement dedans et je me remercie d'avoir insistée, car c'est un des meilleurs roman fantastico horreur que j'ai lu cette année.



Certaines critiques sont bien meilleures que la mienne pour vous expliquer tout le fond social et ethnique représentés dans ce roman. Donc je vous invite à les lire.
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Galeux

« Nous sommes des loups-garous. Et c'est ainsi que nous vivons. Si on peut appeler ça une vie. »



Les brebis galeuses, ce sont ceux que l'on veut sortir du rang parce qu'ils ne sont pas comme les autres ? Ou ce sont ceux qui sortent du rang d'eux-mêmes parce qu'ils ne veulent ou ne peuvent pas s'intégrer ?



Il ne se passe pas grand-chose aux pays des loups-garous et en même temps il s'y passe trop de choses.

Des anecdotes plus ou moins discutables, des sensations, des conseils, des légendes corrigées… On passe d'un Etat à un autre, on change de métier, on se transforme, on porte des jeans, on regarde des jeux télévisés, on vit dans des caravanes, on tombe amoureux, on mange des steaks crus, des lapins crus… J'ai déjà abandonné des romans qui en racontaient plus et pourtant je n'ai pas lâché ce roman.



Stephen Graham Jones parvient à me transmettre les inquiétudes, les joies, les interrogations. J'ai débordé d'empathies pour ce jeune garçon à neuf ans, à onze ans, à quatorze ans, à seize ans… Il est le criminel, le journaliste, le biologiste, le mécanicien, l'auto-stoppeur mais quand sera-t-il le loup-garou comme son oncle et sa tante ? Il y a dans ce roman, quelque chose que j'ai trouvé très touchant et un amour familial primitif absolument émouvant que j'aie aaaadoré !

L'auteur revisite le loup-garou en lui donnant une âme.



J'ai lu parfois que c'était une métaphore pour aborder les Natifs, Stephen Graham Jones étant de la tribu des BlackFeet. Je n'ai pas assez de connaissance sur le sujet. Quoi qu'il en soit, cela peut parler à toutes les personnes qui se sont sentis oppressées pour leurs différences.

Je repense à cette expression Brebis Galeuse, qui est un comble pour un loup-garou. D'ailleurs, le roman parlera de « mouton » pour parler des loups-garous endormis. Pour nous un mouton c'est effectivement celui qui rentre dans le rang sans réfléchir à sa condition. Et tout au long du roman, on se posera une question essentielle qui nous maintiendra jusqu'au bout de la dernière ligne.

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Mon coeur est une tronçonneuse

Je trouve personnellement que Stephen Graham Jones n’a pas une écriture facile facile, qui me permet d’imaginer aisément les situations dans l’espace et le temps, de visualiser les actions. Cela me contraint parfois à relire des passages, m’obligeant de ce fait, à prolonger ma lecture. J’avais ressenti le même effet avec Galeux et Un Bon Indien est un Indien Mort. Et c’est un peu dommage, parce que si je peine avec la forme de son écriture, j’adore le fond et ses idées. Plus particulièrement celui-ci, qui est un excellent, un incroyable, hommage aux films d’horreur !

Plus spécialement au slasher, mais il survolera tout de même les autres sous-genres, tels que le film Rape and Revenge, le film de monstres, de sorcières, de fantômes, de possession, etc…



Jade, lycéenne, est une grande fan de slasher movie et toute son existence vague autour de sa passion. Descendante de Blackfeet comme souvent les personnages de Graham Jones, vivant dans un bungalow de classe sociale inférieure, marginale et passionnée de cinéma de genre, elle n’a pas en réserve, les qualités optimales pour s’intégrer dans cette Amérique qui n'est plus vraiment la sienne.

Ayant passé une grande partie de son dernier trimestre en institut psychiatrique pour une tentative de suicide, elle découvre à son retour une nouvelle élève. Cette nouvelle élève a tout d’une « Fille Finale. » Et si une Laurie Strode ou une Sidney Prescott ou une Sally Hardesty est dans le village, alors pour Jade cela ne fait absolument aucun doute : un slasher se prépare…

Et elle va tenter par tous les moyens de convaincre son prof d’Histoire, le shérif et évidemment La Fille Finale…



Si vous avez adoré Randy Meeks dans Scream, vous adorerez Jade dans Mon Cœur est une tronçonneuse. Parce que comme Randy, Jade a une culture cinématographique du slasher, lui permettant d’avoir des théories et des réponses à tout. Et l'auteur maîtrise son sujet à la perfection !! Avec une description transcendantale de la Fille Finale à la limite du Grand coup de foudre exaltée (je vous invite à lire ce roman ne serait-ce que pour ce passage dans les toilettes du lycée), avec des références de personnages et de films à tout bout de champ, donnant ainsi une argumentation sans faille (les parents et les flics ne servent à rien, le cinéaste aime tromper son public, qui est coupable ?). Jade compare les films d’horreur avec l’Histoire de son village, pour justifier une vengeance potentielle. Est-ce cette fille qui s’est noyée et revient d’entre les morts comme Jason Voorhies ? Est-ce le flic qui se venge de la mort tragique de sa fille ? Est-ce ce prêtre gourou qui a tué ses adeptes autrefois dans ce même Lac ? Mais si vous connaissez les films d’horreurs, vous savez également que tout est trompeur.

N’est-ce pas plutôt Jade qui a des problèmes psychologiques et qui voit un slasher là où il n’y a rien du tout ? D'autant qu'il est parfois difficile de faire la différence entre la passion de Jade, et la réalité.

Où est-ce qu’on ne peut pas utiliser les problèmes psychologiques de Jade pour faire un bon slasher, puisque de toute façon personne ne la croira ? Ou alors ne peut-on pas utiliser Jade, l’inadaptée sociale fan de films d’horreurs pour l’accuser de quelque chose qui dépasse la logique?

Et puis vous savez, il y a toujours un spectaculaire twist final…

« Vu que le slasher existe depuis presque quarante ans, peut-être que la seule façon de créer encore du suspense, c’est de briser les règles du genre. »

Et puis un slasher se veut parfois fantastique puisqu'il est comme Michael Myers, il ne meurt jamais.

Et surtout, il y a l’allégorie de la souffrance et celle de la vengeance, le symbole de la marginalisation sociale, le mal étouffé qui ne se guérit que dans le massacre : la catharsis.



*****



Mention spéciale à la théorie de Jade concernant Les Dents de La Mer de Spielberg. Film que j’adore en tout point, de son travelling compensé à ses répliques cultes, en passant par la musique et un Richard Dreyfuss tirant la langue excédé par l’arrogance de Quint. Oui j’adore ce film.



****



Un grand merci aussi pour cette myriade de souvenirs que m’a apporté la lecture de ce roman, mes nuits vidéos à regarder Laurie Strode courir devant un Michael Myers déterminé, Johnny Depp avec son tee-shirt ras le nombril recraché par son lit en fontaine de sang, Nancy Thompson qui court dans des escaliers en guimauve, boit du café pour ne pas dormir, l’humour douteux d’un Charles Lee Ray empaqueté, les cris de Marilyn Burns, le masque de Jason et les adolescents qui se fendent la poire dans tous les sens du terme, mes heures passées aux vidéos clubs, mon Pop-Corn maison pas toujours réussi trop gras de beurre, et les bonbons qu’on dévorait tandis que Lionel Cosgrove patinait sur du sang, que Regan faisait des 380° avec sa tête, que Ash se battait avec sa main, que Barbara n’attendait pas qu’ils arrivent, que Carol-Ann fixait sa télévision, que Jack Torrance tapait sur sa machine à écrire, que Frank Zito coiffait des cheveux, que Helen Lyle passait derrière le miroir d'une salle de bain, que Thana portait un flingue à ses lèvres avec son costume de none, et tout cela pour échapper au monde réel, celui plus cruel car il est authentique. Alors Jade, ma demi-soeur romancée, je te vois et je te lis. Je te partage à présent. Merci Stephen Graham Jones.



****



Petite note supplémentaire : je vous propose un roman un peu moins punchy mais qui est également un beau petit hommage au slasher : La Dernière Fille de Riley Sager

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Un bon indien est un indien mort

Attribué au général de l’U.S Army Philip Sheridan, l’aphorisme « The only good Indian is a dead Indian » porte en lui-même toute une vision du Natif Américain qui hante à la fois la société Occidentale mais aussi le peuple Amérindien à l’heure actuelle. Souvenir d’un génocide impardonnable et funeste avertissement qui se condense pour devenir le titre du nouveau roman horrifique de Stephen Graham Jones après son magistral Galeux qui vient justement d’être réédité en poche par les éditions Pocket.

Véritable succès critique et public Outre-Atlantique, Un bon Indien est un Indien mort débarque cette fois chez Rivages et tente une nouvelle fois de convaincre le public français du talent presque surréel de l’écrivain Blackfeet. Mais êtes-vous vraiment prêts ?



Chasse interdite

C’est par un drôle de fait divers que l’on pénètre dans Un bon Indien est un Indien mort.

« UN INDIEN TUÉ LORS D’UNE DISPUTE DEVANT UN BAR. » peut-on lire dans le journal. C’est une façon de voir les choses.

En vérité, Ricky Boss Ribs n’a pas vraiment trouvé la mort en se disputant avec des Blancs devant un bar. Autre chose rôdait dans les parages. Une chose qui semble impossible et pourtant.

Ricky fait partie d’un groupe de quatre Indiens issus de la même réserve dans le Montana et de la ville de Browning.

Ricky, Lewis, Gabriel, Cassidy. Quatre autochtones, natifs, amérindiens…enfin quatre Indiens. Choisissez votre génération et votre préférence de langage. Dix ans plus tôt, les quatre amis vont faire une partie de chasse illégale en pénétrant sur des terres où ils ne sont pas sensés traquer le caribou. Mais qu’à cela ne tienne, c’est le dernier jour pour eux où la chasse est possible, le dernier jour où un Indien ne doit pas revenir sans caribou.

Nous sommes cinq jours avant la dinde et le football, cinq jours avant un Thanksgiving classique.

En prenant au piège un troupeau entier, c’est finalement un carnage qui se produit. Un carnage inutile puisque nos quatre chasseurs seront surpris par le garde-chasse qui les contraint à abandonner leurs trophées dans la neige. Parmi les cadavres, celui d’une femelle caribou alors en pleine gestation. La promesse d’un avenir agonisant dans la neige.

Dix an plus tard, Lewis vit avec Peta, une femme blanche et végétarienne qui n’a pas grand chose d’Indienne au contraire de Shaney, une Crow avec qui il travaille et à qui il va finir par confesser cette chasse indigne qui le hante. Petit à petit, des évènements étranges surviennent dans la vie de Lewis. Son chien, Harley, meurt étranglé en tentant de sauter au-dessus de la palissade, la vision d’une étrange Femme-à-tête-de-Caribou dans son salon le faut basculer de son échelle, des bruits de sabots étouffés se font entendre dans les escaliers… Que se passe-t-il dans la vie de Lewis ?

Bien décidé à tirer les choses au clair, le Blackfeet essaye de démêler le vrai du faux, le réel du fantastique. Jusqu’à ce qu’il comprenne que la mort de Ricky n’a rien d’une coïncidence et que lui, Cassidy et Gabriel sont en danger…

Stephen Graham Jones nous livre donc un roman horrifique et fantastique plongé jusqu’aux bois dans la mythologie Indienne pour mieux saisir la réalité d’aujourd’hui. Si Un bon Indien est un Indien mort est un récit surnaturel, c’est justement pour mieux croquer la société Amérindienne d’aujourd’hui. Point de loups-garous cette fois mais une autre créature légendaire qui va venir bouleverser les attentes du lecteur.



Un seul petit Indien ?

De ces attentes, Stephen Graham Jones va constamment se jouer. Car si l’on pouvait légitimement penser que son roman avait tout d’une histoire de monstres ordinaire, rien n’est moins vrai. L’horreur chez le Blackfeet n’a pas un visage unique. Elle ne se donne pas aussi frontalement qu’on pourrait le croire et, en ce sens, la première partie d’Un bon Indien est un Indien mort en déroutera plus d’un, davantage préoccupé par le cadre de vie et les relations entretenues par Lewis que par la malédiction qui pointe le bout de son museau entre les pales d’un ventilateur.

En alternant quelques scènes gores et quelques morts particulièrement graphiques avec une paranoïa insidieuse et mortelle, Stephen Graham Jones tisse une atmosphère lourde et inquiétante qui semble un temps ne pas savoir où elle va.

Mais Stephen Graham Jones a un plan. Depuis le début.

L’horreur larvée, presque subliminale, va graduellement envahir la page et l’esprit des personnages. Notamment celui de Lewis, archétype de l’Indien moderne qui a quitté sa réserve pour adopter un mode de vie différent mais qui, au fond, ne cesse de s’interroger sur ses origines et son identité.

Bien vite, le scope se déporte vers Browning et la réserve pour retrouver les autres comparses, Gabriel et Cassidy.

C’est ici que l’horreur, déjà dévoilée, affirmée comme un retour de bâton du destin, se mêle à l’une des thématiques centrales de l’œuvre de Graham Jones : qu’est-ce qu’être Indien aujourd’hui ?

Dès lors, l’américain dresse le portrait de Gabriel qui tente de renouer le lien avec sa fille Denorah alors que son mariage n’est plus qu’un lointain souvenir, puis celui de Cassidy qui a fini par retrouver l’amour après une longue traversée du désert avec Jolène, une Crow. Et puis Denorah, justement, la Finals Girl, promise à un avenir brillant et magnifique grâce à son don inné pour le basket.

On y croise également Nathan, un jeune qui pleure encore la mort de son grand-père, et une hutte de sudation pour un rite de purification Indien traditionnel et fortement signifiant. Stephen Graham Jones explore l’identité, confronte l’abord de la condition Indienne selon la génération à laquelle on s’adresse et finit par montrer qu’il n’existe pas une identité unique mais une pluralité de chemins vers notre ère moderne. C’est aussi le questionnement sur l’éternel opposition entre tradition et modernité, entre l’importance de respecter les anciens et de construire de nouveaux avenirs, de trouver des modèles et dépasser les clichés pour être qui l’on veut vraiment.

Comme dans Galeux, Stephen Graham Jones ne parle pas tant de l’injustice vécue par son peuple aux Etats-Unis que de ce que sont devenus les Natifs à dans l’Amérique d’aujourd’hui. Du roman d’horreur, on glisse vers le roman social. Mais ce n’est pas tout.



Les non-dits de l’horreur

Car au fond, si Un bon Indien est un Indien mort parle de quelque chose, c’est avant tout de famille, d’amitié, d’amour et des liens qui unissent les personnages entre eux. C’est du respect des générations et de ses racines, de la violence qui habite l’Amérique et hante ses peuples.

Au centre de ce roman de chasse, la fameuse Femme-à-tête-de-Caribou, change forme vengeresse qui symbolise la faute, l’injustice et la rédemption tout à la fois et qui appelle, finalement, à s’interroger sur la façon de mettre fin au cercle de la violence et de la rancœur.

En combattant, en n’abandonnant jamais, mais aussi en acceptant de reconnaître ses fautes et les façons de faire la paix avec soi-même.

Si l’on osait, un pourrait presque dire que le roman de Stephen Graham Jones et un roman sur la réconciliation avec soi, avec un passé où le sang a coulé de façon aveugle et injuste au mépris des règles et des traditions.

Si l’on osait, on pourrait voir un grand roman d’amour dans ce récit où l’on arrache des têtes et où l’on étripe des caribous.

Et si l’on osait, surtout, on pourrait dire qu’encore une fois, l’auteur nous livre un roman passionnant et dense où l’horreur ne masque jamais l’humanité de ses personnages faillibles et torturés.



Roman horrifique singulier et récit social sur la réalité de l’identité Indienne, Un bon Indien est un Indien mort surprend par sa façon de déjouer les attentes et par trouver les bons mots pour parler des maux les plus profonds. Une réussite, encore, qui confirme tout le bien que l’on pensait déjà de Stephen Graham Jones. Un auteur majeur de la littérature américaine contemporaine, définitivement.
Lien : https://justaword.fr/un-bon-..
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Un bon indien est un indien mort



Qu’est-ce que j’entends? Demandez-vous.

Je vais vous répondre. Le bruit qui court. C’est ça que vous allez entendre. Toutes sortes de bruits qu’il va bien falloir que vous preniez en compte, avant qu’il ne soit trop tard. Mais même dans le Couloir de la mort, les bruits courent encore…Et puis, au pire, après, une entité sera là, pour vous réapprendre le mot, Vengeance…



« Donc les nouvelles circulent dans le Couloir de la mort. »



Le bruit des sabots, tout d’abord. Vous savez, les caribous courent, dans la brume rouge. C’est un bruit suffisamment persistant pour qu’un quatuor de jeunes, se laissent prendre à l’énergie de la chasse. Se laissent influencer par l’effet de groupe, allant jusqu’à s’en approcher d’un peu trop près, pour en avoir des idées de traque(s). Des idées de festins, des idées d’interdits, des idées puériles, et des idées qui collent à la peau. Mais l’action pousse au massacre, au nom d’une tradition enfumée, d’un passé nébuleux, d’une inadaptation sourde…Coincés entre deux cultures, deux modes de vies, ils perdent pied, ancrage et raison…Mais ils ne perdent rien pour attendre, on dirait bien puisque que l’outre-tombe s’est frayé un chemin dans le précipice…



« Tuer un petit est la pire chose qui soit, tu le sais. »



Le bruit des indiens, ensuite. Vous savez, les indiens ne courent plus si souvent la plaine rouge. C’est un bruit que certains essayent d’étouffer, d’éteindre, d’exterminer…Le bruit qui court, c’est qu’Un bon indien est un indien mort…Certains s’en donnent à cœur joie et fusils chargés... Le massacre ne fait que, se poursuivre. Les versions diffèrent mais le résultat est le même. UN INDIEN TUÉ.



Le bruit fantôme. Vous savez, les fantômes courent sur les blessures rouges. Rien ne hante plus qu’une douleur ancestrale. Rien ne tue plus, qu’une vengeance. Rien n’arrête un fantôme. Si vous ôtez le sang, il est fort probable qu’en face, ça implique des conséquences…À bon entendeur! Le massacre était prévisible car le bruit gronde, gronde, gronde…



« Ça fait d’elle un monstre? »



Alors des bruits, courent. Supposons que la nature décide enfin de se venger, pour défendre l’avenir: est-ce que ça serait vraiment fou? Est-ce qu’une femelle caribou qui vengerait les siens, de tant de souffrances, de tant de décès, de tant d’injustices, est-ce que ça serait vraiment fou? Est-ce qu’entendre enfin, son cri de détresse, ne serait pas nécessaire, pour eux, pour vous, pour Nous? Est-ce que, se servir d’une histoire d’horreur(s) pour faire passer un message de bienveillance, ce ne serait pas le meilleur remède pour tenter de sauver le Vivant? Est-ce qu’on aurait pas à apprendre auprès de la culture amérindienne, une relation plus intrinsèque avec la faune et la flore? Est-ce que c’est vraiment fou? Vous pensiez peut-être que le monde animal était sourd? Vous pensiez peut-être que la terre vous laisseriez faire?



« La terre réclame ce que vous laissez derrière vous.»



Laissez-moi vous dire, que si vous colliez vos oreilles aux revendications du monde qui nous entoure, il se pourrait que vous entendiez des bruits. Des bruits de colère. Des bruits effrayants. Et moi, j’entends. J’entends la douleur d’un peuple, le rebondissement d’un ballon de basket, les pleurs de la femme-caribou…Est-ce que vous, vous allez entendre alors, le coup de cœur rouge qui se ramène en courant, en ces lignes? Si c’est le cas, alors peut-être que tout n’est pas mort, tout n’est pas fou, tout n’est pas foutu…Je vous laisse donc, avec ce bruit palpitant, je vais aller tenter, l’expérience de la hutte…
Lien : https://fairystelphique.word..
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Earthdivers - À mort, Christophe Colomb !

Je tiens tout d’abord à remercier Babelio et les éditions Black River pour l’envoi de ce comics dans le cadre de la dernière édition de la Masse critique graphique.



Je me suis toujours demandée quel chemin aurait pris l’Histoire si l’Amérique n’avait pas été découverte et colonisée par les Européens.



Le pitch était accrocheur – j’adore les histoires de voyage dans le temps – malheureusement je n’ai pas du tout aimé.



L’histoire alterne d’une manière chaotique les deux époques (2112 et 1492) et il est difficile de suivre le fil de l’histoire d’un côté comme de l’autre. Je n’ai pas trouvé que les personnages étaient bien présentés. J’ai trouvé l’ensemble confus.



Je n’ai pas aimé les graphismes non plus.



J’ai eu la surprise de découvrir qu’il s’agissait d’un premier tome mais je ne lirai pas la suite.











Challenge BD 2024
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Un bon indien est un indien mort

Une erreur s'est produite lors du téléchargement de mes facultés…

J'ai perdu toutes notions de réalité coupée entre rêve et prémonition, le cauchemar s'est incrusté dans mon esprit.

Au bout de 40 pages, j'ai arrêté de souffrir inutilement…

Pourtant tout y était : Amérindiens, romans policiers, roman noir… Je n'ai pas pu… à vous jouer…



Bonne lecture !
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Mon coeur est une tronçonneuse

Jade est à moitié amérinidienne par son père, avec lequel elle vit. Elle a dix-sept ans, une vie compliquée et pas d’amis, un père alcoolique et une mère partie, sans compter que dans sa tête c’est le blizzard: amatrice de films d’horreur depuis ses onze ans, elle les a tous disséqués - avec une adoration spéciale pour les « slashers » - et confond souvent ses délires avec la réalité.

Jusqu’au jour où…

En fait, ce livre est impossible à résumer sinon à dire que c’est un chef d’oeuvre pour les fans de films d’horreur, car les autres vont l’abandonner avant la page 50 c’est sûr.

D’abord, c’est un film de références (lisez Anatomie de l’horreur de St. King avant si vous voulez) et donc si vous ne les avez pas, vous ne suivrez pas. Par ailleurs, le livre suit les pensées d’une gamine un chouïa timbrée, c’est donc du style libre pur, il faut donc aimer. L’un dans l’autre, j’ai adoré. Cette gamine paumée, dans son village perdu sur les bords de l’Indian Lake dans l’Idaho, qui vit entre deux cultures, avec juste un prof d’histoire pour s’intéresser à elle, et bien, elle est très attachante. Son histoire, ses déboires, ses erreurs - chroniques - son envie d’être reconnue, aimée, tout ça est assez bouleversant. Les références horrifiques sont un plus, qui s'ajoutent à ce sentiment de délire, de confusion...

Un livre grandiose à recommander aux fans de films d’horreur qui devraient se pourlécher, car c’est pas tous les jours qu’on tombe sur ce genre de pépite…

je m'en vais chercher le premier ouvrage de cet auteur...
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Mon coeur est une tronçonneuse

La prochaine rentrée littéraire sera dark ou ne sera pas ! La preuve avec le nouvel opus (*) de Stephen Graham Jones, révélé en France l'année dernière avec « Un bon indien est un indien mort ».



Difficile de résumer cette nouvelle intrigue sans rien spoiler. Pour la faire courte, disons que les désirs les plus secrets de Jade - 17 ans - semblent se réaliser lorsque des gens commencent à mourir dans le patelin où elle habite et qu'elle déteste, victimes d'un « slasher » tout droit sorti des films d'horreur qu'elle admire tant. En cause : l'histoire de la bourgade, le passé de ses habitants, ainsi que l'installation de nouveaux riches en ville qui menacent le fragile équilibre de la communauté.



Cette lecture a été totalement démente, parce que d'un côté l'auteur nous donne et nous explique tous les codes inhérents au genre horrifique (via les rédacs que Jade adresse à son prof d'histoire, pleines d'intelligence et d'humour), tandis que de l'autre il bafoue allégrement ces règles pour faire avancer son intrigue de façon surprenante. L'écrivain est vraiment un sale garnement qui sait comment jouer avec les nerfs de ses lecteurs !



C'est un type qui du coeur en plus d'avoir des tripes. Car derrière le gore se cache un véritable roman social, centré sur la parentalité, la marginalité, la découverte de soi et la soif de justice.



Un livre à ne pas manquer qui vous amènera au-delà de la peur, là où se trouve la vérité.



(*) : ce livre constitue le 1er tome d'une trilogie à venir.
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Un bon indien est un indien mort

Dix ans depuis le massacre de caribous de Ricky, Gab, Lewis et Cassidy, quatre amérindiens poursuivis par le fantôme de la femelle.

Un texte qui m'a semblé confus, des longueurs,   comme ces entrainements de basket plus prédominants que les scènes d'horreur.
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Un bon indien est un indien mort

Quatre Indiens ont massacré un groupe de caribous, aux alentours de Thanksgiving, dans un lieu en principe interdit. Parmi les victimes, une jeune femelle enceinte. Son regard ne quitte pas l’esprit de Lewis, celui qui lui a donné le coup de grâce. Et des années plus tard, elle le hante encore. Surtout quand des évènements étranges et violents se déroulent autour de lui.



On commence par une petite interrogation. Je la dois à Gilles Dumay (encore sur le forum du Bélial’) qui a dû lire le roman en V.O. Je suis allé voir la quatrième de couverture en anglais et, effectivement, on y parle de « elk ». Or, selon le dictionnaire, on doit traduire ce nom en français par « wapiti ». Mais, comme vous avez pu le lire en introduction, le traducteur à transformé cet animal en « caribou ». Pourquoi ? D’autant que leurs bois ont des formes quand même assez différentes (de ce que j’en ai vu sur internet : je ne suis pas un spécialiste). Enfin, un mystère de plus.



Le roman s’ouvre sur le décès d’un Indien. On croit comprendre qu’il se fait lyncher par un groupe et qu’il aperçoit, avant de mourir, un troupeau d’élans (mince, des élans, pas des wapitis, ni des caribous ?). Ainsi périt Ricky. On passe à Lewis, un de ses amis d’enfance. Lui a quitté la réserve et vit avec une blanche. Il est inséré, comme on dit, et semble raisonnablement heureux, malgré des tracas habituels du quotidien. Mais en réparant un spot qui semble avoir une vie propre, il repère sur son tapis une femelle caribou. Qui ne peut raisonnablement pas être là. Mais qui lui semble bien réelle. D’autant qu’elle semble provenir de son passé, quand avec ses trois amis, il avait participé à une chasse illégale, dans un territoire sacré. Je parle de chasse, mais tout cela a plutôt ressemblé à un massacre. Et lors de cette opération, une jeune femelle caribou a été abattue alors qu’elle était enceinte. Et le regard de cet animal a marqué Lewis. Comme si sa mort était une injustice. Et que l’enfant aurait dû naître. Comme si lui et ses amis avaient empêché le destin de se dérouler comme il aurait fallu. Tout cela finit par peser sur Lewis qui peu à peu semble perdre la raison. Et il a de quoi : des évènements troublants, voire angoissants ont lieu dans son environnement immédiat. Ses nerfs sont mis à rude épreuve. Jusqu’où ira-t-il ?



Vous vous en doutez, comme souvent dans ce genre de récits d’horreur, la tension monte, l’angoisse et, soudain, tout se relâche dans un déferlement de violence et de sang. Ce roman conserve ce schéma. Avec finesse (même si cela gicle bien comme faut au moment où il faut). La pression gagne peu à peu en intensité et l’on sent au fond de nos tripes que cela peut exploser à n’importe quel moment. Libération et horreur quand cela arrive enfin. Après Lewis, on va logiquement découvrir les deux autres anciens amis, restés dans la réserve. Ils ont bâti des familles, qui n’ont pas tenu. L’un d’eux n’a même plus le droit d’approcher sa fille. On ne peut vraiment pas dire qu’ils allaient bien, menant une vie de paumés. Et d’ailleurs, c’est un autre intérêt de ce roman.



En effet, lire Un bon Indien est un Indien mort, c’est aussi voyager dans cette réserve au plus proche du quotidien d’Indiens actuels. Loin des ancêtres fantasmés des films et des livres américains de l’époque classique. Et si le portrait dressé est proche de la réalité, cela ne donne pas envie : les héros sont des types qui passent leur temps à boire et à ne rien faire de constructif. Ils se contentent de vivre, pas très bien, et de laisser filer le temps. Ils se raccrochent à de vieilles lunes, des images de grandeur passée, en s’en moquant, mais en étant incapables de s’en affranchir. Rien que pour ces instantanés de vie, cette lecture est nécessaire.



Je ne suis pas un grand fan des récits d’horreur. Mon imagination me fait trop bien voir certaines scènes et, non merci. Mais j’ai passé un bon moment à la lecture d’Un bon Indien est un Indien mort. La montée de la tension dramatique, les flashbacks (pardon, les analepses) particulièrement réussis, la plongée dans le quotidien d’Indiens paumés et la figure des caribous (euh, non, des élans… ou des wapitis) m’ont embarqué dans l’histoire que je n’ai pas lâchée avant la dernière goutte de sang, la dernière page.
Lien : https://lenocherdeslivres.wo..
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The Doll Collection

350 pages pour 17 excellentes nouvelles réunies par Ellen Datlow, qui ne nous a jamais déçus par la qualité de ses trouvailles. La plupart des auteurs m'étaient inconnus, j'ai donc foncé les yeux fermés (si, si, je lis comme ça) dans cette anthologie, sans savoir à quoi m'attendre. Mais certains ont peur des clowns, d'autres des poupées anciennes, moi j'ai peur des deux... Chucky a laissé des traces, que voulez-vous.

Et effectivement, toutes les poupées ne sont ni à offrir à des enfants, ni même idéales pour décorer son intérieur. "Objets inanimés avez-vous donc une âme?"... Ces poupées-là, oui.

Qu'elles soient possédées ou qu'elles aient une vie propre, elles m'ont mis les tripes à l'envers, retournée comme une crèpe et tout ce que vous voulez dans ce style.

Si vous lisez l'anglais, si vous aimez être terrifié, sautez sur ce recueil et revenez me voir, qu'on en discute.



Je vous en mets la liste. Yep, j'avais oublié.



• Skin and bone by Tim Lebbon

• Heroes and villains by Stephen Gallager

• The doll-master by Joyce Carol Oates

• Gaze by Gemma File

• In case of zebras by Pat Cadigan

• There is no place for sorrow in the kingdom of the cold by Seanan McGuire

Goodness and kindness by Carrie Vaughn

• Daniel's theory about dolls by Stephen Graham Jones

• After and back before by Miranda Siemienowicz

• Doctor Faustus by Mary Robinette Kowal

• Doll court by Richard Bowes

• Visit lovely Cornwall on the Western Railway Line by Genevieve Valentine

• Ambitious boys like you by Richard Kadrey

• Miss Sibyl-Cassandra by Lucy Sussex

• The permanent collection by Veronica Schanoes

• Homemade monsters by John Langan

• Word doll by Jeffrey Ford
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Galeux

Chassant toujours en des contrées inexplorées, les éditions La Volte ont cette fois déniché un auteur strictement inconnu en France et qui, pourtant, a déjà publié plus de vingt ouvrages par-delà l’Atlantique.

Cet auteur, c’est Stephen Graham Jones, un natif-américain (Blackfoot, pour être précis) et le roman en question, c’est Galeux (Mongrels en VO), finaliste du Shirley Jackson Award en 2016.

Fidèle à leur ligne éditorial, les gens de La Volte nous offre une curiosité quelque part entre le roman fantastico-horrifique et l’épopée sociale d’un gamin qui peine à trouver sa place.

Un livre qui a les crocs, et ça tombe bien, parce que nous aussi.



Loup-garou, y es-tu ?

« Mon grand-père était un loup-garou », nous avertit immédiatement le narrateur de Galeux. Sans détour.

Le narrateur en question, lui, nous ne connaîtrons pas son nom… et à raison.

Jeune garçon élevé par son oncle Darren, loup-fou et féroce père de substitution, et par sa tante Libby, pudique mais sacrément protectrice aussi, notre héros doit d’abord encaisser la fin de son Grandpa, colosse sur le déclin, vielle bête à la peau dure et aux histoires pléthoriques.

Dans la famille, pourtant, les épreuves, on connaît. Partir sur les routes et changer d’État, perdre des proches et retrouver des parents oubliés au bord du chemin, c’est un peu le lot de tous les loups-garous.

Mais pour notre narrateur, c’est aussi une peur, un fardeau, car les années passant, sa métamorphose tarde et il s’interroge : est-il vraiment un loup comme son oncle Darren ?

Parmi une collection de moments choisis et d’aventures plus ou moins sanglantes, le lecteur va suivre le petit garçon alors qu’il devient un homme, de huit à seize ans, de la naïveté enfantine à la douleur de l’âge adulte.

Ce gamin-là, il vit avec quelques fantômes dans ses tiroirs. Une mère morte en couches, un père qu’il n’a jamais connu. C’est déjà pas mal quand on est humain… alors quand on est garou, vous imaginez ?

Mais les garous, voyez-vous, ça ne pleure pas. Les garous, ça avance, ça montre les crocs et ça reste soudés, comme une famille.

Voilà un peu de quoi parle Galeux : de loups-garous, de famille, de passage à l’âge adulte et d’une vie de chien…enfin de loup, évidemment.

Mais si vous pensez que Galeux se limite à une histoire de loups-garous justement, vous avez tort. Vous avez sacrément tort.



Reconstruire le mythe

Sous la plume somptueuse et émouvante de Stephen Graham Jones se terre des trésors de subtilité et d’inventivité. Ce roman-hybride (d’où son titre original, Mongrels) s’amuse non seulement à réinventer le mythe archi-connu du loup-garou mais aussi à l’humaniser de façon terriblement efficace.

Reprenant des bases imparables comme l’argent-kryptonite ou encore la faim qui suit la transformation, l’auteur brise les os du mythes et les refaçonnent à sa manière.

Saviez-vous que la lune n’a rien à voir dans cette histoire ? Saviez-vous que les loups-garous ont une urine qui constitue le plus puissant des pesticides au monde ? Saviez-vous qu’un garou, ça doit porter des jeans sous peine de mort lente et douloureuse ?

Si ce n’est pas le cas, vous allez apprendre un tas de choses amusantes et franchement bien pensées dans ce bouquin qui regorge de trouvailles.

Loin des bêtes sanguinaires des films qui ont finit par leur voler la vedette, les loups-garous deviennent ici des être humains de chair et de poils, de vrais créatures émouvantes et passionnantes pourchassées et dévoyées.

Traversé par des personnages superbes, Galeux redonne un visage et des intentions à ceux que l’on a voulu faire passer pour des animaux mus par l’instinct et le besoin le plus primaire.

Pourtant, la vie n’est toujours pas simple pour ces marginaux dans une Amérique qui ne veut pas d’eux en l’état, qui voudrait en faire des moutons, qui voudrait tuer le loup et récupérer le reste. Roman social, Galeux offre une tribune à des laissés-pour-compte de l’American way of life.

Pauvreté et violence, oui, mais aussi intelligence, courage et…humanité !



Le sang qui m’habite

Au-delà du passage à l’âge adulte de notre narrateur, Stephen Graham Jones s’interroge sur l’identité. Si notre jeune loup n’a pas de nom, il a pourtant bien des qualificatifs : le vampire, le journaliste, le criminel, le biologiste, le prisonnier… Galeux explore la construction d’un gosse qui vit comme un loup-garou, avec des loups-garous… mais qui n’a pas les attributs de ses loups-garous d’oncle et de tante.

Roman de la recherche, de la quête, Galeux retrace le questionnement, la douleur, la peine, l’impatience d’un gamin qui veut désespérément savoir qui il est : humain ou loup-garou…ou pire, mouton ?

Entre les lignes, le message du natif-américain rôde et étend son ombre.

Le natif devient le loup, et notre narrateur devient un bâtard, un hybride, une seconde génération. À travers cette épopée loup-garou, Stephen Graham Jones explique la difficulté à être amérindien en Amérique hier et aujourd’hui…et certainement demain. Certains acceptent et délaissent leurs traditions, d’autres refusent et sortent les crocs. Mais lorsque l’on est au croisement des deux, que fait-on ? Si le loup ne sort pas, est-on vraiment un loup ?

Le sang amérindien devient sang de loup, les légendes américaines se transforment, du Lone Ranger traître à sa propre espèce à un Billy The Kid plus poilu qu’on ne le pense, Stephen Graham Jones décalque le monde réel pour le relire sous sa plume fantastique et tranchante comme un rasoir.

Le lecteur, captivé, s’interroge et comprend alors que le monstre n’en a certainement jamais été un. Que ce sont le monde et les autres, ces humains, ces envahisseurs qui ne sentent pas et ne hurlent pas, qui ne chassent pas à quatre pattes et qui ne souffrent pas pareil, ce sont eux qui ont redéfini les normes des garous.

C’est beau, follement intelligent et carrément émouvant.



Journal d’une enfance et d’une adolescence, roman de loups-garous et de légendes à moitié oubliées, relecture d’un peuple qui se cherche et qui se bat, Galeux de Stephen Graham Jones va vous arracher le cœur et les tripes avant de vous faire pleurer comme l’humain que vous êtes.

Jamais vous ne brûlerez ces lignes, parole de loup.
Lien : https://justaword.fr/galeux-..
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Mon coeur est une tronçonneuse



"Il y a toujours une hache quelque part quand on en a besoin. S'il y a bien une chose que les films d’horreur lui ont apprise, c'est ça."

Révélé en France l'année dernière avec « Un bon indien est un indien mort ».Stephen Graham Jones revient avec ce très bon polar à conseiller aux fans de Slashers movies et à tous ceux qui aiment les thématiques de justice et de vengeance.

Hommage aux films d’horreur, à ceux d’une sanglante vengeance, dans ce roman noir qui en pastiche tous les codes, Mon coeur est une tronconnseuse a été vendu à plus de 200 000 exemplaires aux US et couronné par trois grands prix littéraires : le Bram Stoker Award, le Shirley Jackson Award et le Locus Award.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Un bon indien est un indien mort

Très honnêtement, j’avais dans l’idée de lire ce livre comme un bon roman noir, catégorie que j’affectionne et bien celui-ci : oui mais pas que !

@CatF (qui est pour moi une source fiable de recommandations littéraires car nous avons généralement les mêmes goûts) m’alertait du caractère fantastique du roman.

Ayant pris en compte cette dimension, je me suis lancée dans cette lecture qui m’intriguait. Le cadre fantomatique ne m’a pas dérangé au début. Toutefois, il arrive un moment où le roman bascule dans de la SF ? Du fantastique ? De l’horreur ? Je ne peux y répondre n’étant pas amatrice du genre.

Il y a eu tout de même des passages intéressants et l’auteur a une belle plume mais je préfère rester dans mes sentiers battus du classico-classique roman noir américain, car un caribou vengeur, j’avoue avoir été un peu dépassée.
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Galeux

🍁Automne Fantastique🍁



« C’est à croire que le monde voulait faire de nous des monstres. Qu’il ne nous permettrait jamais de vivre une vie de citoyen lambda. »



Il est des histoires qui débutent étrangement. Et l’étrange, pour commencer l’automne, c’est euphorisant. Muni.e.s d’un plaid, je vous place l’ambiance, on va courir les routes, les forêts, l’Amérique. La belle, la grande, la sauvage. Tous ces grands espaces, où la nature prend le dessus, transforme et révèle. Parce que Galeux sent, autant le bitume que la mousse des bois, parce qu’être ou ne pas être, telle est bien la question: alors est-ce qu’une légende urbaine peut définir, la trajectoire d’une famille?



Il est des histoires qui hurlent à la lune. Je sais déjà que vous voyez venir, la bête. Et pourtant, Stephen Graham Jones remodèle la légende du loup-garou. Exit les clichés, cette histoire réinvente le genre, l’identité, la condition d’un jeune homme en devenir. Ce n’est pas seulement le canidé qui se fait attendre, mais bel et bien, une société qui regarde de haut, ces êtres en marge. Faute de ne pouvoir dompter leurs essences mêmes, elle bride leurs espaces, leurs capacités, leurs natures profondes. Les réduisants à n’être que des Galeux, menant des vies de chiens errants. La voilà, la belle Amérique, celle qui rejette les différents, les trop sauvages, les trop instinctifs, les trop anormaux, les trop hurlants, les trop libres…Ça la dérange, la belle Amérique, tous ces êtres fantastiques…



Il est des histoires qui se transmettent de génération en génération. Des histoires qui portent en elle, le germe de la liberté, de la survie, de la persévérance. Des histoires fabuleuses racontées par les Anciens qui soudent des familles, qui créent le lien, la légende, la force. Des histoires qui s’écrivent dans le sang, dans l’encre, dans l’Histoire. Parce que des fois, il ne reste plus que les mots pour témoigner d’une souffrance ancestrale. Parce qu’il est nécessaire de trouver dans les récits, même imaginaires, surtout imaginaires d’ailleurs, le hurlement puissant pour contrer l’asservissement. Alors n’est pas loup qui veut, mais qui voudrait être mouton?



Tout comme eux, dévorent plus vite que leurs ombres, j’ai lu et dévoré, ce roman extraordinaire. Je me suis attachée à ce jeune, à sa faim, à sa famille, à sa souffrance, à son folklore. Je ne sais pas ce qui fait le garou, mais j’ai ressenti le loup à l’intérieur, il était là et bien vivant, l’œil vif et gueule ouverte, ayant à cœur de protéger les siens. Et si pour éviter de serrer les poings lors de l’écriture de ces ressentis, c’est quand même le cœur mu par l’émotion, que je vous livre cette chronique. Ne brûlez jamais ces lignes.


Lien : https://fairystelphique.word..
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Mon coeur est une tronçonneuse

Je suis enfin venue à bout de cette lecture et pourtant sur le papier celle-ci avait vraiment tout pour me plaire, j'adore les films d'horreur mais ici je suis toujours dubitative sur ce que j'ai lu au final car entre les chapitres en italique qui fait une sorte d'historique de ceux-ci et les sous genres, leurs dates de réalisation etc.



Et l'action ou du coup se déroule des scènes tels qu'on a pu les voir dans la plupart des films d'horreurs, je n'ai pas tellement compris l'intérêt, de même que la plume de l'auteur n'est pas fluide elle est même plutôt ardue à lire ce qui ralentit encore la lecture.



Tout débute ici dans la ville de Proofrock ou vit notre protagonistes et ou il semble se passer des évenements étranges un peu comme dans son genre de film de prédilection.



J'ai trouvé ce récit extrêmement long et je n'ai eu qu'une seule hâte que celui-ci se termine tellement tout était cliché à me yeux, mais je pense que lorsque l'on arrive à la partie du lac avec les sorcières cela a été le pompom pour moi.



Je suis très déçue de cette lecture alors certes j'ai lu ici quelque chose de différent ce que je souhaitait pour sortir de ma zone de confort, mais ici cela l'était peut-être un peu trop pour moi.
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