AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de DianaAuzou


Daniel Arase, je l'ai écouté et réécouté, lu et relu à chaque fois avec un bonheur tout neuf qui venait s'ajouter à la découverte, l'émerveillement, la connaissance et la richesse dont l'historien faisait cadeau à ses lecteurs et auditeurs. Passion, érudition, honnêteté intellectuelle, curiosité, humour, générosité et transmission, un regard et une voix, inoubliables, sans pareil, c'était Daniel Arasse.
Vingt-cinq émissions sur France Culture en 2003, vingt-cinq regards qui traversent l'histoire de l'art depuis l'invention de la perspective jusqu'à la disparition de la figure.
Guide, compagnon et complice, Daniel Arasse accompagne le lecteur-auditeur, lui fait découvrir quelques secrets et paradoxes des peintres, l'emmène vers une compréhension des époques et de la création.
Devant la peinture, l'historien nous fait part de sa double émotion : "l'émotion choc devant le coloris et l'émotion de la densité de pensée qui est confiée à la peinture. Et c'est d'ailleurs ce qui me gêne dans la peinture : à travers ses matières, ses formes, il y a quelque chose qui pense et je n'ai que des mots pour en rendre compte, en sachant pertinemment que mes mots ne couvrent pas l'émotion dégagée. Donc c'est le tonneau des Danaïdes. Je pourrai toujours remplir par des mots et des mots, je n'atteindrai jamais la qualité spécifique de l'émotion d'un tableau de peinture. Même quand un tableau, ou une fresque, a été compris, y revenir c'est affronter de nouveau le silence de la peinture."
Dans les 25 émissions/chapitres Daniel Arasse invite au rendez-vous les siècles témoins de la Joconde, d'une petite Dentellière ou d'une Jeune fille à la perle de Vermeer, ou d'un Verrou immortalisé par Fragonard, témoins des Ménines, de Manet, de Titien, et aussi des artistes majeurs des XXe et XXIe siècles comme Rothko, Anselm Kiefer, Andres Serrano. Il se demande "dans quelle mesure les concepts classiques d'imitation, d'expression et de style sont encore opératoires dans la pratique d'aujourd'hui", comment joue cet anachronisme, et aussi "sur le processus de disparition de la figure dans l'abstraction.
Les précisions autant amusantes que très intéressantes abondent, sur l'accrochage et certaines expositions, sur une thèse volée, la sienne, sur les détails de quelques peintures qui l'ont attiré et lui ont parlé.
Les propres mots de Daniel Arasse expriment mieux que tout autre commentaire ce que c'est un historien d'art : "Un passeur sans prétention, une deuxième main qui passe après l'artiste. Tenter d'être un passeur entre le travail de l'artiste et les contemporains. Car la contemporanéité n'est pas la simultanéité... Pour qu'il y ait contemporanéité, il faut qu'il y ait interaction entre ces deux choses. Je veux dire que dans l'art contemporain, tout n'est pas contemporain, et pour qu'il y ait contemporanéité, il faut qu'il y ait partage des temps entre l'oeuvre et ceux qui la regardent."
Regarder un tableau, l'observer, de près et de loin, y revenir pour saisir son mystère, s'en imprégner, et après, de ces moments d'étonnement de surprise et d'émerveillement, Daniel Arasse a fait des analyses, des commentaires, des recherches où le dogmatisme n'a jamais trouvé sa place.
Le livre, dense et riche est un énorme plaisir de lecture, le don de Daniel Arasse, héritage pour des générations à venir.
Commenter  J’apprécie          3610



Ont apprécié cette critique (35)voir plus




{* *}