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Critique de cedratier


« Les règles du Mikado » Erri de Luca (Gallimard, 150p)
C'est un roman un peu particulier de celui que j'estime comme un des plus grands auteurs de ce début de siècle. Sur la forme d'abord, puisque les deux premiers tiers du livre sont constitués uniquement de longs dialogues qui se succèdent sans aucune phrase de transition mais sur une assez longue période entre un vieil homme et une toute jeune fille tsigane, avant de passer à des lettres qu'ils s'échangent (ainsi qu'un carnet de bord), bien des années après leur rencontre, là aussi sans raccord ni liaison.
Lui est un campeur solitaire qui s'est posé dans les montagnes à la frontière entre l'Italie et la Slovénie, pour fuir ou chercher quoi ? Il faudra attendre la fin du livre pour qu'une explication (assez improbable à mon avis), s'ouvre. Il est en tous cas apparemment lesté des questions existentielles de son âge, sur la vie, la mort, des amours perdues…
Elle, à peine 15 ans, fuit un mariage contraint, s'échappe de son clan, en prenant tous les risques qu'implique dans son milieu son choix de liberté au féminin. Quand elle se glisse par surprise dans la tente du vieil homme un soir d'hiver pour échapper à son père lancé sur ses traces pour laver l'honneur bafoué, cette rupture radicale et sans retour possible ne lui fait pourtant pas renoncer à certaines de ses traditions ancestrales, elle qui lit dans les lignes de la main, est capable de dresser un ours…
Le temps d'un périple où il la protège, il va la guider vers la mer qu'elle ne connait pas, lui ouvrir les espaces d'un nouveau monde. Chacun se donne ainsi à voir de l'autre dans un apprivoisement mutuel où la confiance partagée est au coeur du lien de filiation qui s'établit, malgré les différences de leurs univers. Que feront-ils chacun de ce qu'ils reçoivent, comment en seront-ils transformés, c'est je crois le thème du livre, en tous cas ce qui m'a le plus intéressé.
A moins que je ne l'aie pas réellement saisie (c'est possible), j'ai trouvé la symbolique du mikado, dont le vieil homme se revendique au titre de ses règles de vie, assez confuse et pour tout dire plaquée. Mais j'ai admiré l'énergie vitale très contagieuse de la jeune fille, sa force de caractère.
Les dernières étapes du roman m'ont par ailleurs paru factices, comme s'il fallait absolument trouver une chute surprenante (elle l'est), un noeud dans l'intrigue mais qui est de fait aussi artificiel que peu crédible. Est-ce-moi qui me lasse, après plus d'une trentaine de livres du Napolitain dégustés avec tant de délices et d'admiration, est-ce lui qui vieillit ?...
Même la poésie si habituellement exceptionnelle chez le Napolitain m'a semblé ici plus éteinte, avec moins d'éclat qu'à l'accoutumée. Allez, quand même deux ou trois :
« - C'est comment d'être vieux ?
- C'est quand on te parle et qu'on glisse le mot « encore ». Vous travaillez encore ? Vous campez encore, vous faites encore ça ou ça ? »
« C'était une femme mariée et veuve, belle comme une grappe de raisin en septembre. »
« La poussière dérègle les montres, parce qu'elle veut être celle qui mesure le temps. »
Au final, un De Luca un peu décevant… Sniff.
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