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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Guerre et térébenthine c'est un roman de l'écrivain belge néerlandophone Stefan Hertmans qui rend hommage à son grand -père né en 1891 et mort en 1981 , pas trop mal comme dates non ?
Le grand - père Urbain Martien , prononcer Martine comme l'équivalent de Martin en français répète à plusieurs reprises l'aïeul , va léguer trois cahiers à son unique petit fils , cahiers qui évoquent surtout La grande guerre à laquelle le soldat Urbain Martien a survécu .
Térébenthine , le deuxiéme mot du titre du roman évoque la passion pour la peinture de ce grand - père issu d'un monde disparu , désuet à nos yeux . Grand - père dont le père était peintre , une grande partie du récit raconte la vie de ce père décédé bien trop jeune .
Stefan Hertmans a laissé traîner les trois cahiers , ne se décidant pas à les ouvrir et a finalement publié ce roman lors de la célébration du centenaire de la guerre 14 - 18 , celle qui devait être la dernière .
Bien entendu de tels récits il y a en beaucoup mais celui - ci a une flagrance spéciale , ce sont les souvenirs d'un ancien combattant qui écrit ses souvenirs pour son petit fils .
Je retiens spécialement de ce récit de première main , les ordres de combat qui étaient adressés aux soldats belges uniquement en français , ce qui a conduit à des situations dramatiques , à un sentiment d'humiliation qui a fait devenir un grand nombre de flamands révoltés flamingants , c'est à dire pour les lecteurs français qu'ils ont commencé à défendre leur langue , leur singularité flamande , ce qui a provoqué beaucoup de méfiance , d'incompréhension entre ces deux parties du pays si proches et si différentes à la fois .
Il y a des anecdotes touchantes comme celle où le jeune Stefan reçoit la montre ayant appartenu au père de son grand - père pour son douzième anniversaire et qui l'a fait tomber , il ne pourra jamais se pardonner ce geste maladroit .
L'évocation d'un monde définitivement disparu avec la première guerre , le sort de ses soldats confrontés pour la première fois de l'histoire à une guerre , une boucherie qui les dépasse , où les valeurs sont bafouées , où est le sens de l'honneur lors d'une attaque au gaz moutarde , aux représailles sur les civils , que peut faire l'amour de la patrie lorsque un obus éclate et fait de nombreux morts , des cadavres atrocement mutilés ?
Martien Urbain reste fidèle à son époque , toute sa vie , il porte un costume avec une grande lavallière , même quand il va à Ostende avec son petit fils , homme droit , le pur produit d'une époque révolue .
Un beau témoignage émouvant , une très belle écriture
Je vous recommande chaleureusement cette lecture , encore un bel exemple de litterature belge du nord du pays .
Un grand merci aux editions Gallimard pour ce gracieux envoi .

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Urbain Martien, le grand père de l'auteur naît en 1891 dans une famille aimante, dans la région flamande de Gand, une région pauvre. Son père, un peintre fresquiste qui travaille dans la rénovation d'oeuvres dans les églises a épousé Céline, d'une famille plus élevée socialement mais leur amour a été immédiat et romantique. le jeune Urbain grandit et travaille dans une fonderie puis après son service militaire reste dans l'armée. Son père, qu'il admire lui donne la vocation de l'art et fort de ses cours de dessin et de peinture s'oriente dans la même carrière...C'est sans compter avec la guerre qui éclate et qui va annihiler l'homme et ses idéaux.

Stefan Hertmans avec Guerre et térébenthine, témoigne de son amour et de son admiration pour ce grand père qu'il a connu et qu'il redécouvre en lisant ses carnets. Dans la première partie de la vie d'Urbain, avant la première guerre mondiale, le récit décrit une enfance pauvre mais riche de sentiments notamment entre ses parents, un père dont il admire le talent de peintre, au point de vouloir marcher dans ses pas. le jeune Urbain se paye avec son salaire durement gagné, des cours de peinture et de dessin amorçant sa vocation. Cette première partie du roman m'a le plus intéressée, on y découvre les paysages flamands, la "ségrégation" par la langue française imposée dans les administrations et l'enseignement, reléguant le flamand dans la sphère privée, la pauvreté, les conditions de vie et de travail difficile. Dans la deuxième partie, nous suivons le destin héroïque d'Urbain, trois fois blessé, qui reviendra sombre et taciturne, abandonnant ses ambitions artistiques, .
Un roman intime, et une prose magnifique, un style fluide, une traduction remarquable qui font de ce récit une belle découverte.
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Nostalgie et émotion dans ce récit de Stefan Hertmans, personnage jovial et passionné de la littérature belge que j'ai eu le bonheur de rencontrer à la bibliothèque de ma commune.

Hertmans rend un bel hommage à son grand-père, le héros de son enfance. On y retrouve une Flandre aujourd'hui disparue, extrêmement pauvre, industrieuse et sans cesse humiliée par la bourgeoisie.

Le roman est composé de trois parties, avant-pendant-après la Première Guerre Mondiale, et je dois avouer un certain ennui pour la seconde partie, assez riche en faits de guerre et en batailles. La troisième partie évoque avec beaucoup de pudeur la vie sentimentale du grand-père. La première partie est, selon moi, la plus réussie : Hertmans dépeint de très beaux tableaux, colorés, olfactifs et vivants, de la vie ouvrière au début du XXème siècle, comme celui de la forge, ou celui de la fonderie, sans oublier le mémorable (en tout cas je m'en souviendrai longtemps) épisode de la visite à l'usine de gélatine …

Cet épisode sera tellement marquant qu'il révèlera au grand-père de sa vocation, la peinture, cet art qu'il aura pratiquée toute sa vie sans vraiment devenir l'artiste qu'il aurait pu être … du coup, on ne peut qu'être interpellé par l'affirmation qu'il fait à son petit-fils « Tu peux tout faire, du moment que tu en as envie ». Douloureux mensonge ? Non, je crois plutôt que ces mots sont ceux de l'espoir fou, et totalement compréhensible, de voir nos enfants s'épanouir et réaliser leurs rêves, là où nous avons dû abandonner les nôtres…
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L'auteur nous emmène à la découverte de son grand-père Martien. On découvre sa ville, Gand à la fin du XIXe siècle, vieille ville flamande, avec sa bourgeoisie francophone, ses ouvriers car l'industrie se développe. Martien naît dans un milieu petit-bourgeois, son père est peintre d'église, un homme asthmatique et rêveur. le jeune Martien travaille à la forge mais il veut peindre et apprend en autodidacte. Vient août 1914 et la guerre (deuxième partie du triptyque romanesque), et là le récit de guerre est à la première personne, les combats de la petite armée belge contre l'adversaire allemand sans pitié, l'héroïsme chevaleresque balayé par les mitrailleuses, Martien est blessé plusieurs fois sur le front de l'Yser où l'armée belge décimée en août 1914 s'est retranchée. La troisième partie évoque le retour, l'amour trouvé puis fauché par la grippe espagnole, encore une épreuve à laquelle Martien survit grâce à la peinture, même s'il connaît des périodes sombres. Ma belgitude a été sensible à ce roman où le terreau du mouvement flamand est évoqué : une domination culturelle francophone mal vécue, le mépris des officiers francophones pour les soldats flamands sur le front, le pacifisme flamand né de cette boucherie qui aboutit au pèlerinage de l'Yser dans l'entre-deux-guerres auquel Martien participe...Même si on oublie ici que le soldat francophone qui s'exprimait dans son patois wallon devait connaître le même sentiment d'humiliation linguistique de la part de l'officier issu de la bourgeoisie, même si la langue flamande a gagné ses lettres de noblesse, et ce roman en est une nouvelle preuve, et même si la Flandre est aujourd'hui une des régions les plus prospères d'Europe, le ressentiment est profond et le compromis difficile entre francophones et néerlandophones reste au coeur de la politique belge...Bel hommage en tout cas rendu à Martien qui se prononce "Martine", artiste sensible et soldat courageux.
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Stefan Hertmans nous faut revivre ici les figures de son arrière-grand-père et de son grand-père, l'un et l'autre artistes, âmes sensibles, chrétiens ancrés dans la tradition, l'un et l'autre en prise avec la dureté du monde, la misère sociale pour l'un, la guerre de 1914 – 1918 sur le front belge pour l'autre.
Si d'une façon générale le livre est écrit dans une style fluide et délicat, que la traduction rend apparemment bien, la description de la guerre qui est faite ici est réaliste, sans pathos excessif. le grand-père de l'auteur fait preuve d'un courage hors du commun, et ne s'interroge jamais sur le sens de cette guerre. Ce qui m'étonnera toujours.
Un livre superbe.
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Stefan Hertmans rend hommage à son grand-père en reconstituant sa vie à partir de ses cahiers et ses souvenirs.
1ère partie : "térébenthine" où il raconte son enfance très pauvre à Gand, avec un père , peintre d'église, asthmatique et une mère qu'il adore. Partie très intéressante sur la vie de l'époque, la dureté du travail, la précarité de l'existence et la place du religieux.
2ème partie : "guerre" avec les horreurs des tranchées et en plus l'arrogance et le mépris des officiers francophones pour les Flamands.
Dans la 3ème partie l'auteur revient sur les tableaux "copiés" de son grand-père et les secrets qu'ils dévoilent.
Biographie touchante par le lien qui unit le petit-fis à son grand-père maternel , un siècle d'histoire dans une langue classique fort agréable à lire.
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Une amie m'a conseillé ce livre... Qu'elle a bien fait! J'ai vraiment aimer ce roman de Stefan HERTMANS, auteur belge, flamand qui a une jolie plume si j'en juge par la traduction française qui ne pourrait être aussi bonne sans un matériau de départ d'une grande qualité d'écriture.
Rédigé en flamand, mais depuis traduit dans de nombreuses langues, "Guerre et térébenthine" est l'histoire d'un Grand-Père, racontée par son petit-fils sur base de récits, de notes, de documents divers retrouvés par cet homme qui réalise, en 2014, combien la vie de son Grand-Père vaut la peine d'être contée.

Sans jamais le rendre compliqué et impossible à suivre, il y a de multiples portes d'entrée, dans ce livre. On peut l'aborder sous l'angle de la filiation et des transmissions de savoir et savoir-être qui passent de générations en générations. L'auteur (le petit-fils) nous parle d'un Grand-Père qui, en 1914 n'était qu'un enfant de quelques 17-19 ans, devenu brusquement adulte par sa confrontation à l'engagement au front de la Grande Guerre. Pas du tout inintéressant de réaliser qu'à l'époque, l'adolescence n'avait pas encore été inventée. Prenant et dérangeant de réaliser combien fut brutal l'entrée en âge adulte pour ces mômes envoyés à la boucherie, au nom d'un patriotisme continuellement rappelé par les officiers qui donnaient des ordres... parfois de très loin et sans grands risques pour eux.
Une autre entrée est ce regard sur le mépris avec lequel les officiers francophones donnaient des ordres aux fantassins flamands, les moquant, les humiliants et donnant, par là, une raison valable au flamandisme qui allait se développer jusqu'au radicalisme actuel de certains de nos chantres politiques belges. Nos querelles, bien belges, entre certains 'Flamands et Wallons' ont des racines trempées dans cet humus humain qui a été enseveli dans les tranchées des plaines flamandes et des eaux croupissantes de l'Yser.
Un troisième porte d'entrée, royale celle-là, est l'évolution des techniques et modes de vie des peintres, restaurateurs de fresques ou copistes, ou encore, artistes créateurs picturaux. Les descriptions des métiers du pinceau et de la capacité des peintres à appréhender le monde, dans ses joies comme dans ses peines, occupe une belle place dans ce récit.
Encore plus grande est la place réservée à la description détaillée des conditions de vie dans les tranchées, de l'âpreté des combats, la désuétude des soins et les convalescences qui n'étaient que des intermèdes entre deux retours au front, deux retours en enfer!

Bref, un livre comme je les aime. On y apprend autre chose que la face policée des combats qu'on m'a inculquée au début de ma scolarité. On y perçoit la pénibilité de la vie en ces temps-là, l'art difficile des artisans (je ne regarderai jamais plus une fresque peinte au plafond d'une église sans m'imaginer l'inconfort dans lequel l'artiste, le plus souvent méconnu, a donné tant et tant de son temps juste pour (presque) pouvoir en vivre). Un beau et bon livre d'histoires sur lesquelles s'est fondée L Histoire moins juste, moins vraie et moins dense que celles de ces récits du vécu des petites gens! Un livre qui ouvre à une réflexion et, cependant, offre un moment de détente, de bonheur au lecteur.

Stefan HERTMANS, un auteur belge à suivre!
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Ce récit est une suite d'hommages constituée de fragments de vie et de portraits, de récits de guerre, de vie politique et sociale et bien sûr de peinture, d'images, de spectacles, de matières, d'odeurs.
Après la lecture des carnets de son grand-père, Sefan Hertmans décide de retranscrire l'ensemble des notes de celui-ci pour mettre au jour l'histoire des gens de sa famille, celle de ses arrières grands-parents et de ses grands-parents, celle de ses parents et la sienne même qui apparaît en filigrane à travers son travail d'écrivain et ses souvenirs d'enfance. L'Histoire y est évoquée dans un panorama constitué de tableaux, d'images, de fragments de souvenirs, d'odeurs retraçant la société ouvrière qui souffre de la misère, de la faim, de labeurs infernaux qui évoquent des peintres comme Emile Claus ou Constantin Meunier. Sur la trace du passé, l'auteur nous fait visiter la ville de sa famille, Gent, à travers l'univers pictural inhérent à son arrière grand-père et à son grand-père, souvent lié au spectacle de la mort et de la pourriture ou alors à celui des églises et des saints Ce livre est construit en trois parties : la première porte sur l'enfance et l'adolescence du grand-père, sa dure vie d'apprenti dans une fonderie et sa prise de conscience du désir d'être peintre. La seconde est consacrée à la guerre de 14-18, à l'héroïsme du grand-père et aux humiliations subies par les soldats flamands par les gradés francophones : "ces imbéciles de flamands ne comprennent rien". La troisième partie est consacrée au retour sur le présent de l'écriture de l'auteur et le vieillissement du grand-père jusqu'à sa mort. Les récits sont souvent jalonnés de reproductions photographiques ou picturales, d'extraits de notes non retouchées. En aucun cas misérabiliste, cette oeuvre est un véritable témoignage de l'histoire des hommes, celle dont on ne parle pas, ou peu, dans les livres d'Histoire.

Extrait 1 : Il est témoin d'un épouvantable accident du travail : le fils du forgeron tombe tête la première dans le four brûlant. Il voit le forgeron, qui à ce moment-là était occupé à donner des coups de marteau en tournant le dos au four et ne s'était rendu compte de rien, retirer son fils des flammes en jurant, mais il est trop tard. Ce qu'ils aperçoivent est un visage détruit, une boule noircie par le feu, aux traits vaguement humains où bouillonne un liquide glaireux, mélangé à de la salive ensanglantée. Les yeux calcinés sont blancs comme ceux d'un poisson cuit ; la bouche est un trou noir où billent les dents du haut à présent dégagées. Un jeune ouvrier entre, un seau dans les mains, et verse de l'eau sur la tête. Dans le sifflement et le gargouillement asphyxiants que produit l'eau qui s'infiltre en profondeur dans la peau brûlée, le jeune homme agonisant expulse un dernier gargarisme, tandis que le corps se tord et se convulse. […] Les ouvriers et les apprentis observent la scène fixement. […]
C'est le premier mort qu'a l'occasion de voir mon grand-père. Aucune assistance psychologique n'était prévue à l'époque ; il rentre chez lui et se tait pendant toute la soirée. […]
Puis tout va très vite. Après quelques semaines de recherches et de tâtonnements, il se retrouve à la fonderie. Dur labeur, un garçon de treize ans à peine qui les premiers jours déambule, perdu, dans un vacarme assourdissant […]

Extrait 2 : Aujourd'hui, j'aimerais entendre de nouveau leurs histoires en prêtant attention aux moindres détails car, à l'époque, je voyais sans voir et j'entendais sans entendre, moi le coupable qui, enfant, passait inaperçu dans la pièce et allait quelques années plus tard détruire la montre de leur père défunt. Bientôt, sous le "lanterneau", comme ils appelaient cette ouverture ménagée dans le toit dans laquelle étaient enchâssés des vitraux colorés, la pièce s'emplit de fumée de cigare et de pipe. La bouteille d'Elixir d'Anvers ne tarde pas à se vider, à la demande de Léontine on pose du genièvre sur la table […]. Clarisse a atteint, bredouillante et tremblotante, l'âge de cent six ans, aussi saine d'esprit et calme qu'elle l'avait toujours été ; Mélanie cent trois ans, mélancolique et élégante jusqu'à son dernier jour ; mon grand-père, énergique et sentimental, quatre-vingt-dix ans ; Jules et Emile dont morts à soixante-dix ans passés. Ils étaient tous des survivants, des personnes résistantes, endurcies par la pauvreté durant leur jeunesse et la rigueur des années de guerre, chrétiens jusqu'au tréfonds de l'âme, mais faisaient aussi preuve de pragmatisme, de sang-froid et d'ironie face aux circonstances concrètes de leur existence. Leur mesure du temps était aussi simple qu'efficace : il comptait en fonction de ce qui s'était passé "avant la Grande Guerre" ou "des années après la Grande Guerre". On ne parlait pas beaucoup de la Seconde Guerre mondiale […].
Ils restent assis, se taisent, soupirent, rient, toussent, avalent, prennent tout compte fait encore une petite gorgée, disent : oui, oui, mon vieux, c'est quelque chose, la vie. Je les vois devant moi, les mains posées sur leurs genoux, les unes noueuses avec les pourtours des ongles sales, les autres fines ou pâles. Mais je ne peux les dessiner comme mon grand-père en était capable. Une curieuse lumière surnaturelle éclaire leurs sombres silhouettes, la lumière tenace de ce qui ne reviendra plus.
Lien : http://yzabel-resumes-et-poi..
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En lisant le billet de Dominique je m'étais fait une promesse, mettre ce livre dans ma liste, puis dans ma pile à côté de mon lit, et puis finalement de le lire. Promesse tenue. J'ai bien aimé cette lecture dont un bon tiers est occupé par le récit de la guerre 14⁄18 vu du côté des Belges. Stefan Hertmans a voulu redonner vie à un grand-père très digne et très pieux. Il a voulu aller plus loin que son apparence d'homme sévère habillé en costume et portant tous les jours une lavallière noire et un borsalino. Il a trouvé un homme meurtri par la guerre et qui ne s'est jamais remis des souffrances qu'il a ressenties dans son corps et celles qui ont blessé et tué de façon horrible ses compagnons. La force avec laquelle sont racontés ces combats m'ont permis de me rendre compte de l'héroïsme de cette armée dont je savais si peu de chose avant de lire ce roman. Un autre aspect que j'ai découvert, c'est la domination à l'époque du français sur le flamand (les temps ont bien changé !). Les pauvres soldats flamands non gradés devaient donc obéir à des ordres parfois absurdes et qui, surtout, pouvaient les emmener à la mort donnés par des officiers qui ne s'exprimaient qu'en français d'un ton le plus souvent méprisant. Plusieurs fois, dans ce récit on ressent la langue française comme une façon de dominer les flamands. Comme ce lieutenant qu'il entend dire derrière son dos

Ils ne comprennent rien, ces cons de Flamands

Au delà des récits de guerre, on découvre un homme Urbain Martien (prononcez Martine) qui a aimé et a été aimé par ses parents. Son père, grand asthmatique, lui a donné le gout du dessin mais malheureusement, il laissera trop tôt sa femme veuve avec ses quatre enfants. Urbain connaîtra la misère celle où on a faim et froid et pour aider sa mère il travaillera dans une fonderie sans aucune protection et dans des conditions effroyables. Finalement il s'engagera à l'armée et sera formé au combat ce qui le conduira à être un cadre sous officier pendant la guerre.
Il connaîtra l'amour et sera passionnément amoureux d'une jeune femme qui ne survivra pas à la grippe espagnole ; il épousera sa soeur et ensemble, ils formeront un couple raisonnable.

J'ai eu quelques réserves à la lecture de cette biographie, autant le récit de la guerre m'a passionnée car on sent à quel point il est authentique : nous sommes avec lui sous les balles et les des canons ennemis, on patauge dans la boue et on entend les rats courir dans les tranchées. Autant la vie amoureuse de son grand-père m'a laissée indifférente. En revanche, sa jeunesse permet de comprendre cet homme et explique pourquoi la religion tient tant de place dans sa vie. Pour la peinture puisque c'est l'autre partie du titre disons que le talent d'un copiste même merveilleux n'est pas non plus très passionnant, la seule question que je me suis posée c'est pourquoi il n'a que copié des tableaux et n'a pas cherché exprimer ses propres émotions.
Lien : http://luocine.fr/?p=10823
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Avec cet ouvrage l'auteur rend un bien bel hommage à son grand-père qui fut le héros de son enfance. Urbain Martien (prononcer Martine, c'est la version flamande de Martin) a écrit au soir de sa vie ses mémoires et notamment son engagement comme soldat lors de la première guerre mondiale. Il les lègue à son petit-fils qui tarde longtemps à s'y plonger, convaincu qu'il y a là matière à un livre. L'approche du centenaire de 1914-1918 a poussé Stefan Hertmans à agir. de longs passages des carnets du grand-père sur la guerre (ou la totalité ?) forment le coeur de cet ouvrage, complétés par les souvenirs de l'auteur ou de proches.

Nous découvrons une enfance dans une famille pauvre de Gand. le travail à 14 ans dans une fonderie, pénible et dangereux mais enfance plutôt heureuse néanmoins grâce à l'amour des parents pour leurs enfants et l'un pour l'autre. le père, trop tôt disparu, est peintre d'églises, il restaure des fresques et Urbain qui l'admire souhaite aussi se mettre à la peinture.

Pour sortir de sa condition, cependant, il s'inscrit à une formation militaire ce qui lui vaut d'être sous-officier quand la guerre éclate. Son récit le montre en combattant courageux et soucieux de la vie de ses hommes. Mais les officiers, eux, sont wallons et francophones et n'ont, bien souvent, que mépris pour la piétaille flamande. Les combats sont d'une grande violence. La description des tranchées de Flandre me fait penser à ce que j'ai lu dans le soleil de Breda. On est revenu trois siècles en arrière. C'est intéressant d'avoir cette vision extra-française du conflit. Je vois quand même que ces souvenirs sont retravaillés. Urbain écrit plus de 50 ans après les faits et les événements sont souvent présentés de façon très romanesque. Pour moi cela contribue aussi au charme de la lecture.

L'histoire d'Urbain Martien c'est aussi un terrible chagrin d'amour que nous découvrons petit à petit dans la troisième partie qui raconte sa vie après la guerre. La foi catholique, qui imprègne toute son existence, la peinture, vont lui permettre de survivre.

J'ai beaucoup apprécié cet ouvrage. Je l'ai débuté dans une période de forte charge de travail et j'ai eu un peu de mal à entrer dans le livre du fait d'une lecture trop hachée. Mais une fois que j'ai pu dégager du temps pour m'y consacrer, j'ai été convaincue. C'est bien écrit et émouvant.
Lien : http://monbiblioblog.revolub..
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