Pour réaliser
20 ans en mai 1871,
Jacques Tardi s'est imposé les contraintes telles que définies par
Frans Masereel en 1918 : raconter une histoire en se limitant à vingt-cinq images muettes.
Son personnage a sûrement eu 20 ans au moment de la Commune de Paris. Il a vécu avec ses camarades ses temps mémorables et surtout les répressions dont furent victimes les fédérés. Il semble bien vieux et se traîne avec sa cane. On l'imagine perdu dans ses pensées, repensant à ses camarades, ayant la vision des hommes et des femmes qui tombent sous la répression des troupes de Thiers. Il doit repenser aux affrontements du 27 mai 1871 au cimetière du Paire Lachaise et aux 147 fédérés fusillés contre le mur qui porte aujourd'hui leur nom.
Le personnage semble inquiet mais déterminé, on comprendra à la fin pourquoi. Il prend le train, regarde les vues de Paris et de sa banlieue. Il sort de la gare et prend le métro. Il arrive au cimetière du père Lachaise. Il avance appuyé sur sa cane. Il va être accompagné par des corbeaux dans les allées. Pourquoi des corbeaux ? Que représentent ils, de quoi sont-ils symboliques ? Sont-ils porteurs d'un mauvais présage ? Ils sont dans les allées, sur les tombes.
Le personnage continue d'avancer, il déambule ou du moins trace son chemin au milieu des tombes, s'attardant sur certaines. Une dame en noir apparait, elle tient un sablier qui a de moins en moins de sable, comme le temps qui passe. Est-ce la confirmation d'un mauvais présage, la confirmation que le personnage marche vers son destin, vers sa dernière demeure ? Il voit la dame, voit le sablier. Elle l'accompagne, Il a compris mais il va continuer.
Le personnage est venu pour honorer les fédérés, on le comprend quand on voit le mausolée d'
Adolphe Thiers. Thiers a mené la répression contre les fédérés, il aurait le sang de 15000 communards au moins sur les mains. Provocation suprême, son monument est l'un des plus imposants du cimetière. On ne le visite plus depuis un attentat en 1971 pour commémorer le centenaire de la Commune de Paris.
Le personnage est déterminé et va aller au bout de son combat. Il va commettre la provocation ultime puisqu'il va pisser sur le monument de Thiers afin de marquer son mépris mais aussi pour venger la mémoire de ses pairs. Mais le sablier est écoulé et le ciel va s'emplir de corbeaux. le personnage est mort mais pas le souvenir de la Commune. La dame qui symbolise la mort sourit et les corbeaux semblent rieurs. Est-ce la mort du vieil homme qui les réjouit ou bien l'outrage à Thiers ? À chacun de conclure selon sa sensibilité.
Après avoir illustré le texte de jean Vautrin "Le cri du peuple" consacré à La Commune de Paris,
Tardi revient sur les lieux du crime avec "
20 ans en mai 1871). Il a relevé le défi de le faire en 25 images.
Le père Lachaise de
Tardi m'a donné plusieurs envies : relire le Cri du Peuple, retourner au cimetière du Père Lachaise et aussi découvrir d'autres titres de la collection 25 Images.