Aujourd'hui je vais évoquer
La nuit des hyènes le nouveau texte dérangeant de
Johann Zarca. Cet écrivain est notamment l'auteur de
Paname Underground et de
Chems. Il a déjà exploré le milieu parisien du sexe et de la drogue. Avec ce nouvel opus il retrace la dernière nuit de son héroïne.
L'incipit commence ainsi : « Zyed émerge sur les coups de dix-huit heures, la tête dans le boule, la gueule froissée, la marque de l'oreiller dessinée sur le front. En sueur de la tête aux pieds, il comate un bon quart d'heure sur son matelas, pense à deux-trois trucs, à la nuit dernière, se refait le film, du crépuscule jusqu'à l'aube, mais, au final, ne se souvient pas de grand-chose. » Zyed descend dans le bar familier de son quartier puis quelques heures plus tard il deviendra dans une allée du bois de Boubou dans l'ouest parisien Chicha, travesti prostitué. L'action se déroule en août 2020, quelques mois après le confinement, par une chaude soirée estivale. Chicha va tapiner avec ses copines, elle a son coin, son arbre. Zarca qui est à présent rangé des voitures a l'intention d'écrire le portrait d'une pute, il passe la voir sur place, commence à discuter avec elle, puis la perd de vue dans les allées sombres du bois.
La nuit des hyènes est la reconstitution littéraire des dernières heures de cette pute maghrébine qui gagne sa vie en vendant son corps pour une misère. Un type qui semble bien payer la sollicite, elle ne le sent pas trop, elle se méfie (le soir même elle a pris une raclée par un client de la veille qu'elle avait spolié) et pourtant attirée par l'appât du gain elle va le suivre dans sa voiture jusqu'à un pavillon à Saint-Cloud. Il est nerveux, peu disert, inquiétant. Une fois dans le logement le sexe et l'humiliation se mettent en scène. le lecteur assiste à l'intromission répétée d'une bouteille de champagne dans l'anus de Chicha avant la longue sodomie violente. Elle se sent mal à l'aise, elle voudrait partir, elle surnomme Yves son micheton le Vautour. Mais ils ne sont pas seuls dans la maison, deux potes vont s'inviter aux festivités sans raquer. Ce sont de véritables hyènes, en plus du vautour se trouvent présents le bulldog et le cochon. Chicha subit les pires outrages et insultes, l'humiliation portée par ces casseurs de pédés est extrême. le langage de Zarca porte son oeuvre et rend compte de la vérité de ces heures maudites où trois types jouissent à l'idée de buter un travelo. Cette masculinité sans limite est le pire de l'humanité, ce débordement de testostérone incontrôlé est avilissant.
La nuit des hyènes est inspirée d'un fait divers ; force est de reconnaitre que la noirceur dépeinte par l'auteur est le duplicata de cet infra monde. Chicha est un personnage attachant, on devine le traumatisme de l'enfance qui lui fait croire que cette nuit d'horreur n'est qu'une passade, elle ne veut pas donner à ses bourreaux le plaisir de croire qu'ils la font souffrir. Face à la mort elle trouve la force de leur gueuler en tendant l'index : « tu le vois celui-là ? Fous-le-toi dans le cul, connard ! Et crois pas que c'était la pire nuit d'ma vie, crois surtout pas ça, je suis rodée. Des nuits comme ça, j'en ai connu des centaines avant mes douze ans, espèce d'ordure ! C'est toi, la poubelle, tu ressembles à un vautour ! »
La nuit des hyènes est un texte court et percutant, le style de Zarca est coup de poing dans la gueule, il continue à explorer les bas-fonds glauques et rend un hommage à cette prostituée tombée sous les coups de machos homophobes n'assumant pas leurs pulsions.
Voilà, je vous ai donc parlé de
la nuit des hyènes de
Johann Zarca paru aux éditions Goutte d'or.
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