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EAN : 9782877069663
341 pages
Editions de Fallois (02/11/2016)
4.25/5   6 notes
Résumé :
Malgré mes réticences à me tourner vers le passé, je me suis résolu à mettre par écrit des moments de ma vie pour deux raisons. Cet exercice m'a d'abord permis d'éclairer, à l'intention des lecteurs qui me suivent, l'arrière-plan de mes essais sur Dieu. Il n'y a pas d'un côté ma vie et de l'autre mes idées. Ma vie et mes idées forment un écheveau indémêlable.
Ce livre de souvenirs m'a fourni aussi l'occasion de porter témoignage sur ce qu'a pu connaître de ma... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Voilà des mois que j'ai reçu ce livre. Je l'ai lu, presque aussitôt. Je devais le présenter, pensais le faire dès que j'aurais quelques instants. Mais je n'ai jamais «quelques instants». Il faut toujours courir. S'agiter. S'épuiser.

Sur le coin de mon bureau, le livre comme un pavé de culpabilité. Chaque jour enfoui sous de nouveaux papiers, de nouveaux livres. Comme les regrets qui s'empilent jusqu'à déborder et noyer l'existence.

De regrets, dans cette autobiographie, il n'y en a guère. C'est une des choses qui m'a le plus marquée : un homme se retourne sur sa longue vie, une vie comme on n'en aura jamais, et ne regrette rien. Comme ce doit être réconfortant d'être sûr d'avoir toujours fait les bons choix !

Mais reprenons par le début. Dieu & moi. Comment on devient athée. Et pourquoi on le reste, c'est l'autobiographie de Jean Soler, érudit et penseur dont je vous ai déjà parlé ICI. le titre fait évidemment écho à Qui est Dieu ? et aux autres ouvrages publiés par cet auteur sur les monothéismes — des écrits majeurs, selon moi, mais qui ont été la cible de critiques violentes et, la plupart du temps, injustifiées, pour ne pas dire franchement calomnieuses, de la part de personnes qui refusent un autre regard, anthropologique et historique, sur leurs croyances. Mais ce n'est pas le lieu ici d'en parler. Laissons de côté les gens de mauvaise foi (oui, il y a ici un jeu de mots, assez mauvais mais je l'assume) et revenons à Jean Soler.

Dans cette autobiographie en forme de patchwork de souvenirs notés à mesure qu'ils venaient et non selon l'ordre chronologique (la linéarité de nos existences n'est pas celle de la pensée, ni du sentiment), l'auteur se raconte. Comme il l'indique dans son avant-propos, cela lui permet, dans une certaine mesure, d'expliquer comment il est devenu athée, et pourquoi, par quel jeu de circonstances imprévues il a écrit les ouvrages qu'il a écrits et qui lui ont valu à la fois des éloges et des attaques. Se racontant, avec pudeur et cependant une absolue franchise — je dis franchise, non objectivité : qui aurait la prétention (et la bêtise) de se dire objectif quant à sa propre personne ? —, il nous conduit à travers les moments décisifs d'une vie, ses sommets, ses abîmes aussi. On peut ne pas partager ses idées, sur la politique internationale ou la religion ; on peut ne pas être d'accord avec sa lecture des faits. Chacun est libre de juger selon ses connaissances et ses propres idées. Mais il est impossible de ne pas être fasciné par cette existence inextricablement mêlée à l'histoire culturelle et politique de la France, de la Pologne, d'Israël, de l'Iran, etc. Sans cesse en effet l'intime et le public, le fil ténu d'un trajet personnel et d'une histoire en train de se jouer se superposent, se croisent, tissant un tout.

Le style est net, précis, sans fioritures. Les avis tranchés, et parfois cassants. Pas de langue de bois, pas de volonté d'arrondir les angles. Ce livre n'est pas fait pour plaire, mais pour expliquer. Comprendre. Et, d'une certaine manière, légitimer le travail de toute une vie. Certes, on sent parfois un peu trop chez l'auteur le besoin de mettre en avant les appuis qu'il a reçus de grands noms, d'éminents savants, tels Paul Veyne ou Christian Goudineau. Mais c'est humain. Après avoir été vilipendé, il a le droit de chercher à se défendre. Ce n'est toutefois pas l'essentiel de ces 330 pages, loin de là.

Je recommande cette lecture aux passionnés d'histoire contemporaine, aux amateurs d'autobiographies et à tous ceux qui s'intéressent à l'athéisme. Il est rare qu'on en parle si bien et si clairement.
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Jean Soler est un athée serein et non vindicatif, capable de restaurer une vieille chapelle sans y voire de contradiction. Les Grecs anciens le définiraient sans aucun doute par son ataraxie rayonnante. Les fondamentalistes non encore radicalisés, les intellectuels de « mauvaise foi » et même les ultras de l'athéisme apprendraient beaucoup de la lecture de son dernier ouvrage. Victime d'une polémique aussi injuste qu'inattendue, l'auteur a récemment vu, comme dans le poème de Kipling, ses écrits « travestis par des gueux pour exciter des sots ». Faisant fi de toutes ces jérémiades, Jean Soler leur répond de manière subtile et détournée. Sa stratégie fait le pari de l'introspection afin de dévoiler son vrai visage et damer le pion à ceux qui veulent le déformer. Dans ce but il se fait l'archéologue de sa mémoire, chacune de ses strates révélant une partie de son existence. La vie de Jean Soler est celle d'un honnête homme rarement esclave de ses certitudes, auréolé d'un riche parcours. L'essayiste cède donc le terrain à l'autobiographe et nous relate son enfance catalane, son environnement familial, sa carrière et son cheminement intellectuel. « Dieu et moi » est la confession inversée de Saint Augustin, l'évolution de la vision du monde d'un homme curieux de tout et vacciné contre la rage dogmatique. Ses mémoires accordent de longs passages sur ses rencontres et leur impact décisif dans le roman de sa vie. L'auteur ne cache rien de son évolution, de ses épreuves et de ses bifurcations professionnelles. Il écrit de manière concise, directe, mais sans froideur, avec beaucoup de franchise et d'humanité. Jean Soler a le don de dévoiler tout en finesse des pans entiers de sa personnalité comme sa piété filiale, ou son honnêteté intellectuelle lorsqu'il reconnait sincèrement ses erreurs. Ses passages sur son expatriation en Pologne et en Israël, où il contribua au rayonnement culturel de son pays, sont de passionnants documents historiques. Il y apparait en tant que témoin et acteur, offrant ainsi un autre regard sur les multiples soubresauts du monde d'hier. Il est à souhaiter que ce récit devienne un modèle d'autobiographie éloquente et édifiante, à classer pourquoi pas aux côtés des grands mémorialistes de notre patrimoine littéraire.
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Un livre interessant, un livre important ,un livre dérangeant .Si le titre peut prêter à confusion ,le sous titre,lui est parfaitement explicite :
"Comment on devient athée et pourquoi on le reste ."
Je reviendrai plus longuement sur cet ouvrage remarquable (son auteur l'est tout autant) mais, ce soir, je me contenterai d'ajouter la citation d'un passage très "éclairant" .
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Ou « Comment on devient athée. Et pourquoi on le reste »
Ni dieu ni maître disait l'autre, comme le dit Jean je n'ai pas de dieu mais un maître, lui, Jean Soler catalan d'Arles sur Tech qui a vécu attaché culturel et écrivain devant l'éternel.
En racontant sa vie il nous fait voyager ; Pologne, Israël, Iran, Provence et dans les années 60 à 80.
Il nous parle aussi et beaucoup de Catalogne son pays. Il s'est intéressé aux religions monothéistes presque par hasard et ce faisant en devenant athée, un athée heureux. Il revendique cet athéisme refusant tout agnosticisme prudent.
Ses études sur les traditions de la religion juive et notamment en décryptant le système alimentaire des Hébreux lui ont valu la reconnaissance de grands spécialistes juifs mais pas de reconnaissance officielle car Jean est politiquement tout à fait incorrect. Les éditeurs français très peu enclins aux ennuis lui ont refusé ses manuscrits ; heureusement il y a quelques courageux comme Bernard de Fallois à qui il faut rendre hommage.
Oui Monsieur Soler je vous ai fait mon maître sans votre permission et j'aime ce que vous avez fait de votre vie, cette vie que vous avez tant aimé. Je me suis décidé pour mon plus grand plaisir à lire tous vos ouvrages et je salue votre courage.
Une belle vie très courageuse à lire avec délectation.
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
...j'ai vu le film de Claude Lanzmann,SHOAH .En dépit de qualités incontestables et de l'émotion qu'il communique, j'ai trouvé ce documentaire injuste à l'égard des Polonais .Injuste ou myope . Par ethnocentrisme juif.
SHOAH peut laisser croire que tous les Polonais étaient antisémites et qu'ils ont collaboré avec les nazis pour exterminer les Juifs . A le voir, il est impossible de deviner que les Polonais non-juifs ont autant souffert que les juifs des nazis: ils ont eu deux millions de morts au bas mot . Les nazis considéraient les Slaves comme une race inférieure . A peine les Allemands ont-ils eu conquis la Pologne qu'ils se sont empressés d'éliminer toutes les élitesdu pays, intellectuels, universitaires, ingénieurs, officiers, religieux, en les massacrant ou en les jetant dans descamps . Et malgré cette politique répressive à l'extrême, les Polonais ont oppoé aux Allemands une résistance déterminée, non seulement à Londres où siégeait le gouvernement polonais en exil , mais en Pologne même . Le grand film de Wajda," Cendres et diamants" que j'ai découvert à Varsovie, porte surles deux composantes principales de la Résistance, les nationalistes et les communistes, qui se disputeront le pouvoir à la fin de la guerre . Auparavant, en 1944, la ville entière de Varsovie s'est soulevée contre les occupants . n autre grand film de Wajda, Kanal, traite d'un épisode de cette insurrection qui s'est terminée, après deux mois de combat, ar la mort de 170.000 Polonais et par ladestruction, à 85% , de leur capitale . (1)
On ne peut deviner surtout, à voir le film de lanzmann, qu'au mémorial de Yad Vachem, à Jérusalem, où sont répertoriés et honorésles"Justes parmi les nations", les non-Juifs qui ont sauvé des Juifs au péril de leur vie, cesont les Polonais qui ont le plus de Justes: 6500 environ sur 25000, un quart dutotal, deux fois plus qu'en France . parmi les résistants polonaisà qui les Israéliens ont décerné le titre de Justes figurent le poète Czeslaw Milosz, qui obtiendra le prix Nobel de littérature en 1980 et l'intellectuel catholique Wladyslaw Bartoszewski, survivant d'Auschwitz, qui sera, vers la fin des années 1990, le ministre polonais des Affaires étrangères .
Il n'est pas question pour autant de nier ou d'excuser l'antisémitisme présent dans certains milieux polonais,ni les pogroms qui ont visé les Juifs . mais l convient de replacer ces faits dans leur contexte historique . La Pologne était, de tous les pays, celui qui hébergeait le plus grand nombre de Juifs . Ils n'y étaient pas si malheureux , sinon ils seraient partis . Aucune loi ne les contraignait à rester . Dans les romans d'Isaac Bashevis Singer, prix Nobel de littérature pour une oeuvre,écrite en yiddish, qui retrace la vie quotidienne des Juifs de Pologne avant la Shoah, on constate qu'il y avait de nombreux villages habités exclusivement par des Juifs qui vivaient entre eux, sous la conduite de leurs rabbins, coupés de l'histoire passée et présente de la Pologne, sans même connaitre le polonais .
Imaginons que dans la province française, en 1939, il y ait eu l'équivalent . etqu'à Paris, comme à Varsovie, un habitant sur quatre ait été juif ; oui, imaginons !
L'antisémitisme n'est pas un gène dont certains peuples seraient porteurs, d'autres non .C'st un phénomène circonstanciel . il est en rapport avec le nombre et le comportement, réel ou supposé, des Juifs, en tel lieu, à telle époque . Et il se déclenche quand le pays qui les héberge est en crise . Certains se tournent alors contreeux, à la recherche de boucs émissaires .
(1) tandis que l'Armée Rouge, sur ordre de Staline, reste pendant deux mois l'arme au pied à l'est du faubourg de Praga pour permettre l'écrasement d'une insurrection non-communiste [ Addendum de VétoYves] .
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La crédulité n'est pas un défaut qu'on pourrait corriger, un manque qu'on pourrait combler. Ce n'est pas davantage une question de quotient intellectuel . Il s'agit d'un aveuglement volontaire, apparenté à la "servitude volontaire" mise en avant par La Boétie, l'ami de Montaigne . Le cas le plus probant est celui de Pascal . Ce savant génial admettait , sans la moindre parcelle d'esprit critique, la réalité des miracles rapportés par les Ecritures, et il voyait Jésus partout dans l'Ancien Testament . Le besoin de croire, de croire à tout prix, de croire envers et contre tout--- ce que j'appelle la crédulité--- cohabitait chez lui, dans le domaine religieux, avec la passion de comprendre qui l'animait dans le domaine scientifique . Les deux pulsions étaient côte à côte, mais déconnectées.
Si la crédulité est une drogue douce qui peut aidercertains d'entre nous à vivre, il serait inexcusable de vouloir les en priver . Je recommande même à ceux qui préfèrent garder au chaud leurs croyances plutôt que de les exposer au grand air de ne pas lire mes livres :ce sont des éteignoirs d'illusions .
Malheureusement la crédulité qui aide et la crédulité qui tue ont la même structure élémentaire . Si les circonstances s'y prêtent, le monothéisme pacifique peut engendrer l'extrémisme .
L'aveuglement volontaire est infantile, mais il est puissant . Il est même puissant parce qu'il est infantile . Il évite d'éprouver des troubles quand nous devons décider . D'autres ont décidé pour nous . Nous n'avons plus qu'à obéir .
Dans la lutte engagée entre la clairvoyance et la crédulité, la clairvoyance ne part pas battue. Mais il faudra plus de temps que ne le prévoyaient les philosophes du XVIIIème siècle, dans la lignée desquels je m'inscris . Ils pensaient que le progrès inéluctable des Lumières dissiperait rapidement les ténèbres où s'abritait l'obscurantisme . Ce sera plus long mais nous ne sommes pas obligés d'attendre sans rien faire .
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...j'ai vu le film de Claude Lanzmann,SHOAH .En dépit de qualités incontestables et de l'émotion qu'il communique, j'ai trouvé ce documentaire injuste à l'égard des Polonais .Injuste ou myope . Par ethnocentrisme juif.
SHOAH peut laisser croire que tous les Polonais étaient antisémites et qu'ils ont collaboré avec les nazis pour exterminer les Juifs . A le voir, il est impossible de deviner que les Polonais non-juifs ont autant souffert que les juifs des nazis: ils ont eu deux millions de morts au bas mot . Les nazis considéraient les Slaves comme une race inférieure . A peine les Allemands ont-ils eu conquis la Pologne qu'ils se sont empressés d'éliminer toutes les élitesdu pays, intellectuels, universitaires, ingénieurs, officiers, religieux, en les massacrant ou en les jetant dans descamps . Et malgré cette politique répressive à l'extrême, les Polonais ont oppoé aux Allemands une résistance déterminée, non seulement à Londres où siégeait le gouvernement polonais en exil , mais en Pologne même . Le grand film de Wajda," Cendres et diamants" que j'ai découvert à Varsovie, porte surles deux composantes principales de la Résistance, les nationalistes et les communistes, qui se disputeront le pouvoir à la fin de la guerre . Auparavant, en 1944, la ville entière de Varsovie s'est soulevée contre les occupants . n autre grand film de Wajda, Kanal, traite d'un épisode de cette insurrection qui s'est terminée, après deux mois de combat, ar la mort de 170.000 Polonais et par ladestruction, à 85% , de leur capitale . (1)
On ne peut deviner surtout, à voir le film de lanzmann, qu'au mémorial de Yad Vachem, à Jérusalem, où sont répertoriés et honorésles"Justes parmi les nations", les non-Juifs qui ont sauvé des Juifs au péril de leur vie, cesont les Polonais qui ont le plus de Justes: 6500 environ sur 25000, un quart dutotal, deux fois plus qu'en France . parmi les résistants polonaisà qui les Israéliens ont décerné le titre de Justes figurent le poète Czeslaw Milosz, qui obtiendra le prix Nobel de littérature en 1980 et l'intellectuel catholique Wladyslaw Bartoszewski, survivant d'Auschwitz, qui sera, vers la fin des années 1990, le ministre polonais des Affaires étrangères .
Il n'est pas question pour autant de nier ou d'excuser l'antisémitisme présent dans certains milieux polonais,ni les pogroms qui ont visé les Juifs . mais l convient de replacer ces faits dans leur contexte historique . La Pologne était, de tous les pays, celui qui hébergeait le plus grand nombre de Juifs . Ils n'y étaient pas si malheureux , sinon ils seraient partis . Aucune loi ne les contraignait à rester . Dans les romans d'Isaac Bashevis Singer, prix Nobel de littérature pour une oeuvre,écrite en yiddish, qui retrace la vie quotidienne des Juifs de Pologne avant la Shoah, on constate qu'il y avait de nombreux villages habités exclusivement par des Juifs qui vivaient entre eux, sous la conduite de leurs rabbins, coupés de l'histoire passée et présente de la Pologne, sans même connaitre le polonais .
Imaginons que dans la province française, en 1939, il y ait eu l'équivalent . etqu'à Paris, comme à Varsovie, un habitant sur quatre ait été juif ; oui, imaginons !
L'antisémitisme n'est pas un gène dont certains peuples seraient porteurs, d'autres non .C'st un phénomène circonstanciel . il est en rapport avec le nombre et le comportement, réel ou supposé, des Juifs, en tel lieu, à telle époque . Et il se déclenche quand le pays qui les héberge est en crise . Certains se tournent alors contreeux, à la recherche de boucs émissaires .
(1) tandis que l'Armée Rouge, sur ordre de Staline, reste pendant deux mois l'arme au pied à l'est du faubourg de Praga pour permettre l'écrasement d'une insurrection non-communiste [ Addendum de VétoYves] .
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J'étais dans mon bureau, au Centre culturel français de Varsovie, quand le téléphone a sonné. L'ambassadeur voulait me voir le plus tôt possible.
«Immédiatement ?
- Oui, immédiatement», m'a dit sa secrétaire.
J'étais surpris. Et inquiet. Sans doute allait-il me demander de renoncer au film que je préparais. Les autorités polonaises, autrement dit le parti, avaient dû intervenir auprès de lui. Ce film, mi-fiction mi-documentaire, voulait montrer la vie quotidienne à Varsovie, avec ses difficultés multiples, d'un étudiant français bénéficiaire d'une bourse polonaise. J'aurais porté par ce biais, sans que ce soit explicite, un regard critique sur le régime.
Quand je suis entré dans son bureau, l'ambassadeur, Arnauld Wapler, que j'appréciais beaucoup, m'a dit, sans préliminaires : «Nous venons de recevoir un télégramme du Département. Vous êtes nommé conseiller culturel à l'ambassade de France à Tel-Aviv.» J'ai été assommé.
«Mais, monsieur l'ambassadeur, je n'ai rien demandé ! Quand j'ai fait le tour des bureaux, au début de mes vacances, tout le monde m'a dit : "Vous faites du bon travail en Pologne. Continuez !" Et nous ne sommes qu'en octobre. Je ne peux pas accepter.
- Vous ne pouvez pas refuser. On vous offre un poste plus important que le vôtre. C'est une marque de confiance. Ici, vous dirigez un centre culturel seulement, à Tel-Aviv vous dirigerez le service culturel de l'ambassade et vous aurez autorité sur toute la mission culturelle.
- Mais je ne veux pas être diplomate, je préfère travailler sur le terrain, dans un centre, pour organiser des manifestations.
- Vous pourrez le faire. Vous serez en même temps le directeur de l'Institut français de Tel-Aviv, l'un des plus grands que nous ayons. Vous disposerez de plus de moyens qu'à Varsovie.
- Mais pourquoi moi ?
- Parce que vous avez prouvé votre aptitude à réussir des opérations en milieu difficile. Ce que nous n'avons pas manqué, le conseiller culturel et moi, de mettre en valeur. Le bien que nous avons dit de vous se retourne contre nous ! On nous prive de vous prématurément.
- Mais Israël n'est pas un pays difficile, ce n'est pas l'équivalent d'un satellite de l'Union soviétique !
- Détrompez-vous. Depuis la guerre des Six Jours, l'an dernier, et le renversement des alliances effectué par le général de Gaulle, les relations politiques, militaires ou économiques entre les Israéliens et nous sont gelées. Il n'y a que le domaine des relations culturelles et scientifiques qui est préservé, d'un commun accord, pour ménager l'avenir.
- Et ce poste est à pourvoir quand ?
- Tout de suite.
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On m'a reproché aussi d'avoir dit : "L'existence de la Shoah est la preuve irréfutable de la non-existence de Dieu " . Cette phrase n'exprime pas une croyance opposée à une autre croyance, c'est un énoncé scientifique . Qui est vérifiable, comme ils doivent tous l'être, sinon par une expérience matérielle, du moins par une "expérience de pensée", comme disent les chercheurs . Si Dieu existait, il n'aurait jamais permis ou plutôt décidé, puisqu'il est par définition Tout-Puissant, la Shoah . Je ne veux de mal à personne mais je demande qu'on m'explique comment on arrive à tenir ensemble , d'une part, une hypothèse: Dieu existe et il a choisi les Juifs pour être son peuple de prédilection, 'autre part, un évènement historique: l'extermination, dans des conditions atroces, de 6 millions de Juifs, hommes, femmes et enfants confondus . Dans n'importe quelle discipline scientifique, quand les faits démentent une hypothèse, l'hypothèse est abandonnée . Pourquoi devrait-il en être autrement dans les religions ? Et qu'on ne dise pas, une fois de plus : "les desseins du Seigneur sont impénétrables ". Quels desseins pourraient justifier des massacres de cette ampleur ? Si Dieu a voulu punir son peuple, que lui reprochait-il ? Et quels péchés avaient commis les enfants ?
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