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EAN : 9782365690676
448 pages
Editions Les Escales (28/08/2014)
3.56/5   24 notes
Résumé :
Une formidable fresque romanesque qui retrace tout le xxe siècle russe à travers la destinée hors du commun d'un génie scientifique et des femmes de sa vie, des troubles révolutionnaires jusqu'à la chute de l'URSS. Autodidacte prodige, dès son arrivée à Moscou, Lazare Lindt devient le plus proche collaborateur de son professeur de sciences. Il tombe aussi fou amoureux de son épouse, Maroussia, dont il attendra en vain un amour tout autre que filial. Après la mort de... >Voir plus
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Le roman foisonnant de Marina Stepnova suit les événements qui traversent l'histoire compliquée de la Russie sur plus d'un siècle, depuis le temps des tsars jusqu'à la révolution, le communisme puis la Perestroïka.
Elle choisit de raconter ces crises du pouvoir en URSS en prenant pour fil conducteur un génie scientifique affectivement immature, autour duquel vont graviter trois femmes : Maroussia, la femme parfaite et inaccessible ; Galina l'épouse volée devenue monstrueuse et Lidia, la petite-fille malheureuse.

Lazare Lindt est un véritable génie, enfermé dans un corps fragile et enfantin, mais destiné à atteindre les plus hauts sommets de la science soviétique. Il apparaît dans le roman comme un mystérieux génie tombé du ciel dans les loques d'un gamin des rues.
"Il était apparu à Moscou de nulle part, comme si Dieu l'avait incarné juste sur le seuil de la seconde université de Moscou, par un matin de novembre 1918 croustillant de gel."

Il est reçu par Tchaldonov, un mathématicien célèbre , qui est immédiatement convaincu de ses prodigieuses capacités, et qui va l'accueillir chez lui. N'ayant pas eu d'enfant, Tchaldonov et sa femme Maroussia vont rapidement le considérer comme leur fils.
Mais Lindt tombe éperdument amoureux de Maroussia.

" Oui il a vingt neuf ans et il est amoureux d'une femme qui en a soixante. Non il n'est pas amoureux, il aime une femme qui a soixante ans et il l'a aimée quand elle en avait quarante-neuf. Et aussi cinquante-cinq. Et il continuera de l'aimer quand elle aura atteint ses quatre-vingts ans, et il est parfaitement clair qu'il en sera de même quand lui aussi aura cet âge. (...)
Parce qu'il n'y a rien de plus normal au monde, de plus limpide et de plus simple que son amour, et cet amour est une lumière, une fidélité, un désir de protéger et de se soucier d'un autre être. de se trouver simplement à ses côtés. de s'émerveiller. D'écouter. de suivre avec un regard admiratif. "

Marina Stepnova disséque les sentiments de Lazare Lindt avec une grande justesse et présente l'image d'une femme idéale, syndrome de la Madone, que rien ne peut salir et qui conserve son piédestal jusque dans la mort. Parce qu'il voue un véritable culte à cette femme, Lindt est incapable de lui avouer son amour et de la confronter à son désir.
En parcourant longuement cette représentation de l'amour impossible, l'autrice fait en parallèle un portrait très tendre de l'amour conjugal, celui qui unit Maroussia et son mari, alors même que leur désir d'enfants n'a pu s'accomplir.

Elle décrit aussi par son intermédiaire la grande misère sociale de ce pays qui sépare les familles et envoie sur les routes des femmes et des enfants obligés de mendier. Les pages consacrées à l'accueil des réfugiés dans l'appartement du couple nous permettent de prendre conscience de cette réalité mais offrent également un très beau portrait de Maroussia et de celles qu'elle soutient.

Malgré son génie, ou à cause de lui, Lindt ne comprend rien aux lois simples de la vie humaine au quotidien. Pire encore, il ne remarque pas et ne comprend pas les nuances de sentiments et se contente d'une façade trompeuse.
A la mort de Maroussia, alors qu'il a soixante ans, il est séduit par une jeune fille qui ressemble à sa bien-aimée, Galotchka, de 41 ans sa cadette et déjà promise à un autre.
Il est le père de la bombe atomique, couvert de prix et d'honneurs, et son assistant la fait quasiment enlever avec l'aide du KGB et l'accord tacite de ses parents terrassés par la peur pour qu'il puisse l'épouser. Lindt se contente alors de la présence de sa jeune épouse sans même soupçonner qu'elle ait pu subir une quelconque contrainte. Et il ne se préoccupe ni de ses sentiments, ni de sa froideur à l'égard de leur fils.

Parallèlement aux images de grande pauvreté qui jalonnent le roman, l'autrice dénonce ces batailles de pouvoir qui donnaient à certains de somptueux privilèges. L'époque du stalinisme est aussi une époque de privilèges pour une élite bureaucratique, certes instable mais qui bénéficie de grands appartements, de livres et de nourriture abondante. En tant que scientifique, Lindt n'était pas menacé par les purges régulièrement menées même si on a fait pression pour qu'il revienne à Moscou.

Autour de lui, et autour des trois femmes qui lui sont liées, se tissent de très nombreuses histoires, petites ou grandioses, appartenant aux personnes avec lesquelles ils entrelacent leur existence.
Marina Stepnova, en digne représentante de la littérature russe, excelle dans la description de ces vies annexes livrées avec chaque fois une grande profondeur. Elle montre les détails de la vie de ses personnages d'une manière qui en dit long sur la vie et la société russes.
Avec une approche humaniste, elle semble considérer que chaque vie mérite d'être racontée et accorde toute son attention à ses personnages secondaires même lorsqu'ils n'effectuent qu'un passage éphémère dans la narration.

Dans ce roman d'une grande densité, de nombreux sujets sont abordés (la vie des juifs en URSS, les exactions d'un régime totalitaire, les privilèges dans un régime communiste , le traitement inhumain des enfants dans les écoles de ballet russe, la violence envers les femmes ), mais c'est aussi un livre sur l'amour et sur ce que son absence peut provoquer.
C'est du moins ce que l'autrice a exprimé en décrivant son livre comme " un roman sur l'amour. À propos de tout ce que l'amour fait aux gens. Et tout ce que les gens font par amour."



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Un magnifique roman qui retrace le XXème siècle russe à travers la destinée hors du commun d'un génie scientifique,Lazare Lindt et des trois femmes de sa vie,Maroussia la femme de son mentor,Galina sa femme et Lidotchka sa petite-fille.En 1918,apparu à Moscou de nulle part,orphelin pouilleux,Lazare entre à dix-huit ans dans l'histoire de la science,grâce au professeur Tchaldonov et sa femme Maroussia.Il s'éprendra éperdument d'elle,un amour non réciproque,le couple l'adoptant comme le fils qu'ils ne purent avoir.Devenu un enjeu du pouvoir soviétique,grâce à son génie et son travail sur la bombe atomique,il obtiendra tous les privilèges des plus puissants apparatchiks.Il suit son mentor et sa femme jusqu'à la ville de N-sk,il y restera.A la mort de Maroussia ,à soixante ans ,il jette son dévolu sur une jeune fille de 41 ans sa cadette,et l'épousera gràce a sa position privilégiée....Mais le livre commence et se termine avec sa petite-fille.Maroussia,Galina,Lidotchka,trois femmes aussi différentes que les époques qu'elles incarnent,de la guerre civile à la Pérestroïka.Chacun essait d'être heureux à sa façon,comme il peut.On sent une solitude immense dans chacun des personnages,hormis je dirais Maroussia,mais il n'y pas vraiment de tristesse.La prose incroyable de Marina Stepnova pleine de fougue et d'humour ne laisse aucune place ni au drame ni à l'ennui.J'ai adoré ,j'ai dégusté ce livre,que dire,pour moi c'est un chef-d'oeuvre!Il a d'ailleurs été couronné par le Book Prize 2012 ,le plus grand prix littéraire russe,et aussi un grand Bravo pour la superbe traduction!
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Zut, alors, je me suis un peu (pas mal) ennuyé à la lecture de ce livre et je ne partage donc pas l'enthousiasme de Bookycooky et isaboul, quoique je le le comprenne parfaitement.

La quatrième de couverture de Les femmes de Lazare nous promet une grande fresque russe, de la Révolution à l'éclatement de l'URSS. Si l'on entend par là un roman qui brasse allègrement les époques avec une foultitude de personnages en marge des événements, alors oui, on peut adhérer à l'expression. L'intrigue de l'ouvrage de Marina Stepnova se tisse à travers trois femmes de Lazare : Maroussia, l'inaccessible ; Galina, l'épouse ; Lidia, la petite-fille. Pour ce qui le concerne, Lazare Lindt est un drôle de type, un autodidacte génial, scientifique et savant atomiste. Son portrait intime constitue l'un des meilleurs aspects du livre, notamment son amour fou pour Maroussia, laquelle, hélas, n'éprouve pour lui que des sentiments filiaux. Il est fréquent que le roman bondisse de quelques années, parfois même d'une ligne à l'autre. Il est très touffu, souvent étouffant avec une exubérance de détails du quotidien. le style de Stepnova est également déroutant : brillant et sophistiqué, il peut devenir trivial et familier. La transition entre les différentes périodes de l'histoire russe du XXe siècle n'est pas marquée dans le récit et peut le rendre confus, au moins pour les esprits quelque peu distraits. C'est peut-être une question de moment ou d'attention et ce ne sera pas obligatoirement le même ressenti pour chaque lecteur mais voici un livre qui a tous les ingrédients pour passionner et qui cependant se révèle souvent ennuyeux. Cet avis est personnel et fortement subjectif. Cela va sans dire mais cela va mieux en le disant.
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Quelle vaste fresque familiale ! Elle démarre peu après la révolution jusqu'à la fin des années 90.
Trois portraits de femmes, bien différentes l'une de l'autre : Maroussia, aimée en secret par Lazare mais qui n'éprouve pour lui que des sentiments maternels, Galina qu'il épouse de force et qui doit feindre un amour alors qu'elle n'a pour lui que de la répulsion, et enfin Lidotchka, sa petite-fille, immensément douée pour la danse alors que cette activité ne la passionne guère.
Lazare Lindt est le lien entre ces femmes, un savant juif, assez laid mais vénéré par son pays car il fait partie de l'équipe qui développe la bombe atomique russe.
Le récit n'a rien de linéaire, les retours en arrière sont fréquents, il est toutefois admirablement bien construit.
Roman très russe à mon avis, il foisonne de personnages.
Malgré son style fait de longues phrases, je l'ai lu avec facilité et d'une traite.
Je le recommande.
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Ce roman parle notamment de l'histoire de trois femmes qui ont compté pour Lazare Lindt, génie autodidacte en sciences. Tout d'abord, Maroussia, mère d'adoption et fantasme inassouvi; Galina, sa femme plus jeune de 40 ans et épousée "par force" à ses 18 ans et qui lui vouera une haine continue. Cette haine, ou du moins ce détachement émotionnel sera reporté par la suite sur la petite fille Lidia, dernier personnage féminin du roman. Au final, Lazare ne sera qu'un rôle secondaire dans cette oeuvre. le roman parcoure ainsi l'histoire du 20ème siècle de la Russie, avec certaines réalités historiques.

Ce livre a reçu de nombreux prix en Russie mais j'ai trouvé ça long, très long... Il aurait gagné en intérêt à mon sens à être réduit d'un bon tiers pour vraiment me captiver. J'ai également un doute sur la qualité de la traduction car, à de nombreuses reprises, les mêmes adjectifs sont répétés dans une même phrase et cela, sans créer un style littéraire.

Bref, c'est un rendez-vous raté.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Plus d'une fois il a été convaincu que le sens de l'humour,le profil moral d'un individu,sa façon de boire ou même son odeur suis generis avaient sur le plan théorique une importance infiniment plus grande que les notions de citoyenneté ou que la carte géographique.C'etait logique et pertinent.Juste.Et conformément à cette logique et à cette pertinence,il n'y avait pas dans ce monde,et il ne pouvait y avoir,d'êtres solitaires.Il n'y avait que des individus qui n'avaient pas reconnu les leurs et étaient par voie de conséquence forcés d'errer en compagnie de gens qui leur étaient étrangers.
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Elle comprit soudain qu'il ne se taisait pas, mais que de façon à peine audible, à la limite de la sensibilité du nerf auditif, il marmonnait un galimatias mélodieux, abscons et incohérent, comme dans un rêve où chaque mot pris à part est tout à fait vivant, aussi rond que des perles en verre que l'on enfile l'une après l'autre, chacune est compréhensible, mais toutes prises ensemble s'entremêlent en un écheveau confus, compliqué, privé de toute signification et donc particulièrement effrayant.
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Elle se nourrissait de ces récits, comme des enfants se nourrissent d'une légende écoutée pour la première fois, encore toute neuve, qui est véritablement enchantée, dans laquelle il y a un nouveau thème après chaque revirement, après chaque silence que se ménage le conteur afin de reprendre son souffle, un monde merveilleux et inconnu se dressait devant elle qui s'imprimait tout de suite, semblait-il, dans son cœur.
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Mais les élèves de dernière annee, comme Vitkovski, aspiraient généralement à aller à Moscou, non à en partir, afin d'être le plus près possible du prestigieux Bolchoï, ce temple de la danse dans le monde, célèbre pour ses cachets de misère, ses rites bestiaux et son répertoire classique dans lequel rien à la époque n'avait changé depuis des décennies, ni les étoiles, ni les pas, ni les applaudissements, ni les têtes de cochon des responsables de l'État dans la loge impériale.
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Au bout de la rue déserte se levait un soleil immense et indifférent. Il y avait devant lui une longue vie. Une très longue vie.
Et Lazare Lindt prit consciencieusement la direction qui le mènerait à la dernière page.
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Vidéo de Marina Stepnova

Interview de Marina Stepnova - Les Femmes de Lazare
Marina Stepnova, interviewée lors du Salon du Livre de Paris 2014, nous parle de son roman Les Femmes de Lazare (parution le 28 août aux éditions Les Escales). Elle nous parle également...
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