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France Camus-Pichon (Traducteur)
EAN : 9782072988585
Gallimard (05/10/2023)
4.13/5   268 notes
Résumé :
Alors que la menace de Tchernobyl plane sur l’Europe, la vie londonienne de l’aspirant poète Roland Baines se fissure soudainement. Peu après la naissance de leur fils, son épouse l’abandonne pour se consacrer à l’écriture de son roman, plutôt qu’à son rôle de mère. Commence alors pour Roland une trépidante exploration de son passé afin de remonter aux prémices d’un tel échec. Par bribes se dévoilent ses premières années vécues en Libye auprès d’un père tyrannique. ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (44) Voir plus Ajouter une critique
4,13

sur 268 notes
Le léopard ne change pas ses taches.
Ce n'est pas de l'ODP31 après une insomnie passée en compagnie d'un reportage animalier au milieu de la Savane à attendre le trépas d'un gnou, innocent mais un peu trop lent, ce n'est pas davantage une pub pour de la lessive, mais la citation d'un petit auteur confidentiel inspiré mais expiré, Shakespeare. Il y a pire.
Les deux principales leçons retenues du pavé de 650 pages de Ian McEwan c'est primo, que l'individu ne change pas malgré les épreuves, que les traumas de l'enfance sont plus tenaces qu'un tatouage raté avec le prénom d'une ex, et deuxio, que le destin n'est pas qu'une affaire de volonté. Autant dire que le célèbre auteur britannique ne va pas abandonner la littérature pour se lancer dans une carrière de coach de vie.
Roland Baines, pas dénué de talent mais souffrant d'une grosse carence en combativité, est quitté sans préavis par son épouse après la naissance de leur fils car elle veut consacrer sa vie entière à la littérature. Cette rupture, qui intervient au moment du passage du nuage de Tchernobyl, gentil petit amas de vapeur condensée d'iode et de césium parti faire de la Tyrolienne jusqu'à nos thyroïdes, va faire refluer un destin abimé. Celui d'une enfance en carence d'affection avec un père militaire et autoritaire, une mère en expiation. Celui d'une adolescence abandonnée sans petits cailloux dans un pensionnat austère et d'une innocence abusée par une prof de piano, qui ne jouait pas que du piano debout, mais couchée sur son élève. Tout était écrit.
Ian McEwan vient donc de publier son « homme sans qualité », il fait muMusil avec le destin d'un antihéros qui traverse l'histoire, sa vie et les grands évènements de ce monde comme un chroniqueur désabusé par lui-même. Plus spectateur de sa vie que supporter de ses rêves. Etudes ratées, petits boulots, pianiste de bar, poète de slogans publicitaires, amant quitté, le lecteur a tantôt envie de sortir Roland Baines de ses eaux stagnantes pour l'aider, tantôt le désir de l'y noyer.
Le planté de drapeau se mérite à la dernière page mais j'ai apprécié la construction du roman qui joue avec la chronologie de souvenirs désordonnés.
L'auteur entremêle biographie et fiction puisqu'il partage avec son personnage les mêmes années et lieu de naissance et ses parents lui avaient également caché certaines boutures généalogiques.
Comme Jonathan Coe, Ian McEwan excelle également dans la rencontre de ses personnages avec l'histoire récente. Les passages consacrés à la chute du Mur de Berlin son parmi les plus réussis du livre. La petite histoire dans la grande histoire sans faire trop d'histoires.
Je ne rangerai pas ce titre dans les classiques de Macaniche McEwan car un petit régime minceur aurait pu l'alléger d'une bonne centaine de pages sans nuire à son IMC (Indice à mots couverts) mais « Leçons » fait bien ses devoirs avec des personnages aussi complexes que tordus. Les suivre toute une vie permet de voir comment chacun s'arrange avec sa conscience, quitte à réécrire l'histoire.
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Qu'est-ce qui fait une vie ? Tous les destins sont le produit de circonstances, « événements et accidents, personnels et mondiaux, minuscules et capitaux » , qui nous lancent sur un chemin plutôt qu'un autre. « le monde se divise à chaque instant concevable en une infinitude de possibilités invisibles. » Et si, « tous ces itinéraires qui n'[ont] pas été empruntés », l'on jouait le temps d'un livre à les imaginer « encore présents et praticables » ?


C'est un peu l'aventure dans laquelle, avec génie et humour, Ian McEwan s'est lancé en imaginant une sorte d'envers, à la fois à sa propre histoire et au point de vue habituel de la société, au travers des mémoires d'un homme, non seulement passé à côté de sa vocation artistique, mais aussi abusé par une femme pendant l'adolescence, puis abandonné avec un bébé sur les bras par une autre, prête à tous les sacrifices pour le bien de sa carrière littéraire. Et toujours, infléchissant le destin de ses doubles de fiction, le poids de l'Histoire, avec ses hauts et ses bas plus ou moins visibles sur l'instant, mais qui n'en tissent pas moins l'inextricable toile d'araignée dans laquelle tous tentent avec plus ou moins de bonheur de tracer leur chemin.


Lorsque s'ouvre le récit, Roland Baines, trente-sept ans et vivotant de ses petits métiers, se retrouve seul avec Lawrence, son fils âgé de six mois. Alissa vient de les abandonner tous deux, avec pour seule explication qu'elle s'était trompée de vie. Pour Roland commence une longue rumination de ses échecs, lui dont l'existence, sautée brutalement, comme celle de l'auteur, de Tripoli où son père, officier écossais de l'armée britannique, était en poste, à un pensionnat britannique, fut comme « reprogrammée » à partir de ses onze ans par l'influence d'un professeur. Si, dans la vie réelle, ce « professeur extraordinaire » transmit à Ian McEwan le feu sacré de la littérature, geste essentiel dans le parcours du futur écrivain, le rôle est tenu dans le roman par une professeur de piano, autoritaire et possessive, qui, éprise de l'adolescent plus encore que de ses réels talents musicaux, le tiendra sous son emprise sexuelle entre ses quatorze et seize ans. Une expérience – en ces années 1970 où d'aucuns défendaient la pédophilie au nom de la liberté sexuelle – qui devait secrètement, mais irrémédiablement, bouleverser sa future vie sentimentale, lui interdisant longtemps le bonheur, mais aussi mettre un terme à ses études et gâcher son avenir artistique. Ainsi réduit à la précarité, seul et sans formation, c'est lui qui, plus tard, se retrouvera empêché, comme les filles-mères autrefois, par une paternité célibataire dans des conditions économiques difficiles.


On le voit, l'ironie n'est pas exempte de ce récit d'une réalité parallèle, produit d'événements aussi fortuits que celle vécue en vrai par l'auteur, que la narration s'emploie à malaxer avec les mêmes ingrédients historiques. Fait des mille riens – et pourtant – d'une existence anonyme, ce récit de toute une vie est aussi, avec un naturel incroyable d'aisance, de précision et de clairvoyance, une fresque, ample et ambitieuse, retraçant cent ans d'évolution de la société britannique en particulier, du monde en général. Des étudiants antinazis de la Rose Blanche éliminés par le régime hitlérien au temps du père allemand d'Alissa à la chute du mur de Berlin en passant par la crise des missiles à Cuba ou encore par le nuage de Tchernobyl, des excès du libéralisme thatchérien au Brexit mais aussi, plus largement, à la prise de conscience de la vulnérabilité de la planète, tous les baby-boomers retrouveront en ces pages l'écrin historique de leur propre parcours de vie.


S'il est ici question de leçons, ce n'est sûrement pas de vie, alors que, balle dans le flipper de la vie, chacun pourra, comme l'auteur et ses personnages, entre ironie, tendresse et nostalgie, calquer son propre itinéraire sur la vitre de l'Histoire, mais, sans conteste, de génie littéraire, confirmant, s'il en était besoin, la place de choix occupée par Ian McEwan dans le paysage littéraire britannique et mondial. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Nous ne serions pas seuls maîtres à bord ?
J'ai peine à vous croire.

Leçons, roman de l'auteur britannique Ian McEwan, reprend beaucoup d'éléments autobiographiques : père officier sorti du rang, enfance aux colonies, pensionnat anglais et une situation familiale comportant de lourds secrets. Toutefois, Il a rajouté un élément majeur, l'abus sexuel, pour mettre ce qui aurait pu être un récit autobiographique sur un toute autre trajectoire. C'est que Roland, le personnage principal, est loin d'être un auteur à succès.

Roland fait partie de ces gens qui ne trouvent jamais leur voie. Il est assez doué pour pas mal de choses, mais ne se sent pas capable de choisir, de concrétiser, de s'engager. Sans doute l'abus dont il a été l'objet a-t-il mis en marche une réaction en chaîne qui l'empêche de terminer ses études secondaires, d'avoir une relation satisfaisante avec une partenaire ou de vivre autrement qu'en collectionnant les petits boulots qui lui permettent tout juste d'élever son fils. Un fils qui pourrait être la seule constante dans la vie du père, son succès, mais qui, bien que matheux surdoué, répète dès l'adolescence le schéma paternel : sortie prématurée de l'école , petits métiers, errances…Même si l'espoir reste permis : il poursuit une Maîtrise en sciences climatiques malgré l'absence de Bac. Pour Roland aussi il reste une lueur d'espoir : en vieillissant, il commence à s'interroger, et ce qui a été une existence au jour le jour pourrait prendre sens, devenir une vie…

McEwan s'est posé la question de savoir ce qui nous mène. Les choix personnels ? Ce que notre environnement direct attend de nous ou nous impose ? Ou bien sommes-nous emportés par de grands mouvements collectifs, tels que les guerres, les crises économiques ou les changements à la direction de l'État ? Quelle est la part du hasard ou de la chance dans ce qui nous arrive ? Dans quelle mesure sommes-nous des acteurs délibérés ? Sommes-nous même prisonniers des choix faits ou subis par nos parents ou grands-parents ? Leçons montre tous ces facteurs en interaction dans le cadre d'un roman et des personnages principaux qui le peuplent. Il semble favoriser l'hypothèse que un ou plusieurs de ces facteurs peuvent être à l'oeuvre pour pousser le cours d'une vie dans une direction donnée, nous mettant alors sur un chemin qu'il est très difficile de quitter.

J'ai été très intéressé par les thèmes de Leçons, mais je n'ai pas accroché ni au style ni à la structure qui - au moins dans la première partie- m'a semblé aussi chaotique que le parcours de Roland. Certainement un effet voulu par l'auteur, mais je ne l'ai pas apprécié. Et ça m'a semblé long, très long. Aussi long qu'une existence faite de bric et de broc qui ne semble pas rimer à grand'chose. Six cents pages pour montrer la vulnérabilité d'une vie humaine : était-il bien nécessaire d'enfoncer ainsi une porte ouverte ? Je ne le pense pas.




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Oui, c'est vrai, il est trop long ce roman.

Mais bon sang, c'est une sacrée bonne histoire qu'il nous raconte là, un de nos auteurs britanniques préférés … Alors oui, c'est vrai, on aurait pu en enlever une centaine de pages. Pour garder la quintessence du sujet. Mais bon, on ne va pas bouder notre plaisir : l'histoire de Roland Baines, pendant ses quelques soixante-dix ans, est bien attachante.

Et cette histoire elle commence au milieu de la vie de ce narrateur qui a alors 36 ans et un bébé de six mois sur les bras. Ici c'est une histoire inversée par rapport à celles qu'on connaît habituellement, de ses femmes délaissées alors qu'elles sont enceintes, et qui connaissent une vie précaire en élevant seule leurs enfants. Roland est désemparé. Sa femme Alissia vient de lui laisser un mot sur la table de la cuisine : elle part, définitivement, parce qu'elle ne veut pas de ce type de vie (qui lui fait penser à sa mère plus jeune) et va s'adonner à la lecture, sans mari, et sans enfant. C'est sans espoir, comme ce nuage de Tchernobyl qui s'annonce et qui devrait faire un demi-tour et ne pas se propager par-delà la Manche …

Roland est très attachant. C'est un père attendrissant, qui consacre toute son énergie, et ses maigres ressources d'assisté social au départ, à son fils Lawrence. On est presque chez Ken Loach.

Mais tout n'a pas toujours été comme ça. Petit, Roland a vécu en Libye à Tripoli – balloté au gré des affectations de son père militaire – et auprès d'une femme aimante mais soumise à son mari brutal. Pour son bien, il est ramené en Angleterre et intègre un pensionnat pour jeunes gens défavorisés où il va faire l'apprentissage des moeurs de la société anglaise. Roland est doué. Pas tellement pour les études, où il ne brille dans aucune matière, mais pour écrire des vers et surtout pour jouer du piano.

Hélas … il va connaître une aventure déconcertante, alors qu'il va tomber sous l'emprise d'une curieuse professeure de piano, qui … ne s'intéresse pas qu'à son doigté derrière les touches blanches et noires. Mais celle-là, on la reverra plus tard dans le roman.

Passé cette histoire rocambolesque, qu'on a plus l'habitude de lire dans l'actualité en miroir inversé – un homme protecteur mais nourri de mauvaises intentions et une adolescente naïve et manipulée – on va suivre le parcours chaotique de notre héros. Lorsqu'il quittera le collège (on saura à la fin dans quelles conditions) il va courir de petits boulots en petits boulots, en dilettante, sans jamais vraiment trouver sa voie, hormis la part qu'il consacre à l'éducation de son fils Lawrence à qui il accorde toute son attention.

L'histoire d'Alissia n'est pas banale non plus : d'origine allemande on saura tout sur l'histoire de sa mère Jane, et de son enquête auprès des témoins d'un mouvement anti nazi lors de la seconde guerre mondiale. Pendant ce temps Alissia entamera une carrière d'écrivain : débarrassée de mari et d'enfant elle pourra se consacrer totalement à son oeuvre en négligeant les lettres que lui adresse son fils de dix ans.

Qu'aurait pu devenir Roland ? Un musicien de jazz dans le prolongement d'un Thelonius Monk ? un poète reconnu bravant l'adversité (alors qu'il utilisera son talent littéraire pour une start up qui surfe sur la vague libérale en vendant des slogans pour des cartes de voeux à deux sous) ? ou bien le mari de Carol, jeune femme avec qui il pourrait fonder un foyer recomposé ? ou enfin arracher la belle Daphné aux griffes de son mari politicien qui va basculer dans le camp des UKIP ?

Et puis il y a la petite histoire dans la grande histoire. En partant de Tchernobyl, on suivra Roland à Berlin à l'occasion de la chute du mur, auparavant on aura suivi l'existence d'un couple en RDA, victimes du régime est-allemand, et on entendra parler de Margaret Tchatcher, de Gordon Brown ou de John Major, de Boris Johnson, du Brexit et du COVID.

Ian McEwan a-t-il pioché dans son histoire personnelle pour élaborer le portrait de cet homme – sans qualité ? – qui aura manifestement du mal à trouver sa voie ? On s'en moque en fait.

Avec beaucoup de tendresse pour son personnage, notamment pour ce père attentionné pour son fils, on s'attache à Roland Baines et à son destin d'homme « reprogrammé » par une femme qui l'a abusé et qui hésite toujours à s'engager. On songe aussi à un Jonathan Coe du « Royaume Désuni » notamment. Mais avec toujours ce brio et cette intelligence qui sont la marque de fabrique de McEwan.

Pas de « leçons » dans ces « Leçons » donc, juste une attention aux petits détails qui plantent le décor de nos dernières soixante dix dernières années et on se régale.

C'est tout.
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Il approche, mais pas de la même façon selon qu 'on soit Allemand,Français ou Britannique. le nuage de Tchernobyl va croiser la vie de Roland Baines dans une période compliquée : Tout juste papa, sa femme l'a plaqué, essaimant derrière elle quelques cartes postales la menant en Allemagne.

C'est le point de départ de ce magnifique roman qui va nous faire traverser l'existence de Roland de sa naissance à la fin des années 40 jusqu'au début des années 2020.
Bien sur on croise L Histoire britannique , miss Maggie, Gordon Brown ou John Major, les excités du Brexit mais aussi celle de l'Allemagne où se passe une bonne partie du roman. Et l'on peut se demander , comme le fait Roland inconsciemment si la politique , le nuage , le mur qui tombe influencent notre vie ? Oui, non , peut être ? sans doute.

On va tenir la main de Roland , que ce soit lors de sa rencontre avec la folle du cul qui lui apprend le piano , avec ses conquêtes , en papa touchant, en mari aimant après la soixantaine, en homme avec ses fragilités , ses certitudes, on va le regarder travailler en free lance , un peu de piano , quelques poèmes . Et on va s'attacher, on a le temps en 650 pages.
On va naviguer entre les époques , mais Ian McEwan est un formidable capitaine , il ne nous perd pas et nous pousse à nous questionner sur l'existence et particulièrement sur ce qu'est une existence réussie.
Il nous livre ici deux chemins qu s'éloignent, recueillant postérité ou bonheur familial.
Tous les personnages sont travaillés, tout est magnifiquement amené et développé.
Ce livre est à l'image de son auteur , brillantissime .
Un gars qui a pu me captiver sur la plage de Chesil où il ne s'est rien passé ne pouvait pas me décevoir dans le roman d'une vie , sans doute , un peu la sienne , en tous les cas celle qu'il aurait eu s'il n'avait pas écrit, comme il le répète dans ses interviews.
J'ai oublié de vous parler de tellement de choses que je ne vais même pas chercher , d'autres l'auront sans doute fait pour moi.
Putain , ça fait du bien de lire de tels romans.
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critiques presse (6)
LeJournaldeQuebec
22 février 2024
Chaque roman du Britannique Ian McEwan est une véritable expérience en soi. Parce qu’il va se faire bouleversant, parce qu’il va déboucher sur ce que l’humain peut accomplir de pire, parce qu’il va réussir à nous ébranler d’une manière ou d’une autre. Et Leçon n’échappe pas à la règle.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
LaCroix
07 novembre 2023
En brossant le portrait d’un homme désarmé par la dureté du monde, Ian McEwan met son existence en miroir. L’écrivain britannique signe un roman ample et sensible, traversé par l’histoire, hanté par la perte.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LeMonde
26 octobre 2023
En [...] offrant la ma­gnifique construction de "Leçons" [à Roland], en transformant ce destin en un roman vaste et absorbant, Ian McEwan montre à quel point son héros se trompe.
Lire la critique sur le site : LeMonde
SudOuestPresse
23 octobre 2023
Voix essentielle du roman britannique contemporain, Ian McEwan revient avec un antihéros au charme touchant et aux rêves perdus.
Lire la critique sur le site : SudOuestPresse
LaLibreBelgique
20 octobre 2023
Ian McEwan a donné quelques-uns de ses propres traits biographiques à l'attachant Roland.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LeFigaro
16 octobre 2023
L’un des plus célèbres romanciers britanniques actuels peint le portrait de Roland Baines, héros contemporain, dont la vie lui a peu à peu filé entre les doigts. Touchant et brillant.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (51) Voir plus Ajouter une citation
Les liaisons et les mariages depuis longtemps terminés finissent par ressembler aux cartes postales du passé. Quelques mots sur la météo, une anecdote, drôle ou triste, une photo ensoleillée au recto. Premier à disparaître, le moi insaisissable, précisément ce que l'on avait été soi-même, comment on apparaissait aux yeux des autres.
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L'ennui d'un adolescent de quinze ans peut avoir le raffinement de la technique du filigrane d'or portugais, de la toile sphérique de l'araignée de Karijini
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La tentation des vieillards, nés au beau milieu des événements, était de voir dans leur mort la fin de tout, la fin des temps. De cette façon leur mort aurait plus de sens. Il acceptait de voir le pessimisme comme un bon compagnon de la réflexion et de l’étude, et l’optimisme comme l’affaire des hommes politiques, que personne ne croyait. Il connaissait les raisons de se réjouir et avait parfois cité les indicateurs, les taux d’alphabétisation et ainsi de suite. Mais c’était par comparaison avec un passé épouvantable. Impossible de le nier, de nouvelles horreurs nous entouraient. Des nations gouvernées par des gangs criminels en cols blancs ne cherchant que leur enrichissement personnel, maintenus en place par des services de sécurité, par la réécriture de l’Histoire et un nationalisme passionné. La Russie n’était qu’un exemple parmi d’autres. Les États-Unis en proie à un délire colérique, conspirationniste et suprémaciste pouvaient en devenir un autre. La Chine faisait mentir l’affirmation selon laquelle le commerce avec le monde extérieur ouvrait les esprits et les sociétés. Avec les technologies à sa disposition, elle pouvait perfectionner l’État totalitaire et offrir un nouveau modèle d’organisation sociale pour concurrencer ou remplacer les démocraties libérales – une dictature reposant sur une circulation fiable des biens de consommation et un certain degré de génocides ciblés. Le cauchemar de Roland était que la liberté d’expression, un privilège en recul, ne disparaisse pendant mille ans. L’Europe chrétienne du Moyen Âge s’en était passée tout aussi longtemps. L’islam n’y avait jamais attaché beaucoup d’importance.
Mais chacun de ces problèmes était local, limité à la modeste échelle du temps humain. Ils se réduisaient à un noyau amer contenu dans la coque d’un problème plus vaste, le réchauffement de la planète, la disparition des animaux et des plantes, la perturbation des systèmes interdépendants que sont les océans, la terre, l’atmosphère et la vie, magnifiques équilibres nourriciers que nous forcions à changer sans bien les comprendre.
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A l’époque, au milieu des années 1970, il se faisait une piètre opinion des écrivains britanniques. C’était une posture défensive et méprisante. Il les voyait dans les émissions culturelles de la télévision et lors d’apparitions publiques. Impossible de prendre au sérieux ces types en costume cravate ou veste de tweed qui gardaient chez eux leurs richelieus et leur gilet toute la journée, étaient membres de clubs comme le Garrick ou l’Athenaeum, habitaient une imposante villa du nord de Londres ou un manoir de Costwolds, s’exprimaient avec suffisance, comme on pouvait le faire après avoir pontifié toute sa vie au collège All Souls d’Oxford ; qui ne s’étaient jamais aventurés au-delà de leurs cinq sens en consommant une drogue autre que le tabac ou l’alcool, dont ils refusaient mordicus d’admettre qu’il s’agissait de substances psychoactives et addictives ; qui avaient, pour la plupart, fréquenté les deux mêmes vieilles universités où ils se connaissaient tous ; qui fumaient la pipe et rêvaient d’être anoblis. Trop d’écrivaines portaient un collier de perles et parlaient sur le ton énergique des présentatrices de radio pendant la guerre. Aucun, homme ou femme, ne prenait alors dans ses écrits selon lui le temps de s’émerveiller du mystère de la vie ou de redouter ce qui devait suivre.
Ils se consacraient à des peintures superficielles de la société, à des tableaux sardoniques des différences de classe. Dans les contes sans envergure, la plus grande tragédie était une liaison orageuse ou un divorce. Seuls quelques-uns semblaient se soucier de la pauvreté, des armes nucléaires, de l’Holocauste, de l’avenir de l’humanité ou même du recul de la beauté des campagnes sous les assauts de l’agriculture moderne.
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Je n'avais jamais profité de notre vie ensemble. J'en étais incapable parce que je pensais avoir été trahie par l'existence. C'est le mot qu'elle a employé . Betrogen . J'étais incapable de me laisser aller, d'être joyeuse et d'aimer la vie que j'avais avec ma fille. Et parce qu'elle même m'aimait, parce qu'elle était si proche, elle non plus ne s'était jamais autorisée à être heureuse. C'aurait été une seconde trahison. Au lieu de quoi elle m'emboîtait le pas, m'imitait, devenait moi. Elle aussi était aigrie dans l'existence. Impossible de trouver un éditeur pour ses deux livres. Elle aussi avait échoué à devenir écrivaine. Elle aussi ..."
Jane s'arrêta et se frotta le front avec son index.
"J'ignore si j'ai le droit de vous en parler...
- Allez-y.
- Très bien. Elle aussi s'est trompée en se mariant. Elle vous prenait pour quelqu'un de génial et de bohême. Votre talent de pianiste la séduisait. De la même façon que j'avais pensé qu'Heinrich avait été un héros de la résistance et continuerait à l'être. Vous l'aviez trompé sur la marchandise. " C'est un dilettante, Mutti, il ne se tient à rien. Il y a dans son passé des problèmes qu'il ne veut même pas affronter. Il n'arrive à rien. Et moi non plus. Ensemble on sombrait. Puis il y a eu le bébé et on a sombré plus vite."

(p.299)
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Vidéo de Ian McEwan
Rencontre avec Ian McEwan à l'occasion de la parution de son roman Leçons aux éditions Gallimard.


Ian McEwan a passé une grande partie de sa jeunesse en Extrême-Orient, en Afrique du Nord (en Libye), et en Allemagne, où son père, officier dans l'armée britannique, était envoyé. Il a fait ses études à l'université du Sussex et l'université d'East Anglia, où il a été le premier diplômé du cours d'écriture créative créé par Malcolm Bradbury. Insolite et insolente, provocatrice, hautement originale, l'oeuvre de Ian McEwan surprend par ses tours de force de concision et d'humour. L'auteur joue avec les énigmes qui sont l'essence de la narration. Tous ses romans affichent une parenté lointaine, sous forme de simulacre, avec l'énigme policière. Il a publié plusieurs nouvelles et romans pour adultes et, en 1994, le Rêveur, un recueil de nouvelles pour la jeunesse.
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13/03/2024 - Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
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