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EAN : 9782072697869
272 pages
Gallimard (16/03/2017)
3.81/5   110 notes
Résumé :
Sen-nen - prénom japonais dont la signification ne se révélera que tardivement - est marié à Mathilde, une Française. Ancien professeur de littérature française dans une université à Tokyo, Sen-nen vit désormais à Paris avec sa femme, atteinte d'une grave maladie qui l'oblige à garder la chambre. Tous deux mélomanes, ils se sont connus lors d'un stage de musique en France.

Bien avant cela, à Paris, Sen-nen avait fait la rencontre capitale d'une canta... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (24) Voir plus Ajouter une critique
3,81

sur 110 notes
Une fois n'est pas coutume, je trouve nécessaire de rendre compte ici non pas d'un roman de cet auteur, mais de quatre d'entre eux qui me semblent étroitement liés.

Akira Mizubayashi est japonais, mais c'est en français qu'il écrit des romans prenant la musique pour thème central. Cet écrivain est un cas tout à fait exceptionnel, pour au moins quatre raisons :
- primo, parce qu'il n'est pas nativement d'origine franco-japonaise, il a appris la langue française réellement comme une langue étrangère et relativement tardivement ; pour moi qui maîtrise l'allemand couramment, je mesure à quel point je serai bien incapable d'atteindre un tel niveau de jeu littéraire avec cette langue, qui appartient pourtant au fonds des langues européennes, et dont la distance linguistique est minuscule rapportée à celle, abyssale, qui sépare le français du japonais !!!
- secondo parce qu'il se sert de la langue française avec une époustouflante virtuosité et une justesse tout à fait exceptionnelle pour rendre compte d'émotions musicales, ce qui est rarissime comme j'ai pu le constater car, au cours de mes lectures, j'accorde une attention particulière aux écrivains qui tentent de rendre compte d'un autre art, comme par exemple Grainville avec "L'atelier du peintre" (cf recension) ou "Falaise des fous" (cf recension), Proust étant bien le seul à restituer, magistralement, ses perceptions tant de la musique (Vinteuil) que de la peinture (Elstir)...
- tertio parce que l'intrigue de ses romans repose toujours sur une grande rencontre amoureuse narrée avec une remarquable pudeur : pas de scène scabreuse, pas de pornographie graveleuse, c'est là encore tout à fait exceptionnel dans la littérature d'aujourd'hui !!!
- quarto parce que ces romans, écrits et publiés ces dernières années, illustrent comment et combien les conséquences des horreurs commises pendant la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) influent aujourd'hui encore sur le cours de la vie des générations postérieures.

L'auteur recourt à la technique musicale désignée par l'expression "variation sur un thème". En effet, la trame de ces quatre romans est la même : avant la Seconde Guerre mondiale, un jeune japonais est amené à poursuivre ses études à Paris, où il fait la rencontre – délicatement amoureuse – d'une jeune française. La mobilisation générale contraint le jeune homme à rentrer au Japon, sa compagne devenant la mère d'un enfant conçu juste avant la séparation. Variation propre à chaque roman : deux générations plus tard, les petits-enfants découvrent ce passé...

Ces dernières années, l'auteur a publié une trilogie consacrée aux instruments à cordes (violon, alto, violoncelle) :

- Mizubayashi Akira (1951-) – "Ame brisée" – Gallimard / Folio, 2019 (ISBN 978-2-07-292121-6)
Lecture qui me servit de découverte de cet auteur ; l'instrument de musique central est ici le violon. L'âme en question étant ce minuscule petit cylindre de bois qui instaura la Grande Différence avec la famille des violes de gambe...

- Mizubayashi Akira (1951-) – "Reine de coeur " – Gallimard / Folio, 2022 (ISBN 978-2-07-301739-0)
L'instrument de musique central est ici l'alto, ce grand violon accordé une quinte en dessous du violon, doublant à l'octave les cordes du violoncelle. L'exercice est méritoire, car les pièces originales écrites spécifiquement pour cet instrument sont d'autant plus rare que l'auteur se limite à la période de la musique occidentale depuis l'époque classique (l'alto avait un rôle plus gratifiant jusqu'à l'époque baroque) : j'en sais quelque chose, puisque j'ai moi-même suivi un cursus d'altiste dans ma jeunesse.

- Mizubayashi Akira (1951-) – "Suite inoubliable " – Gallimard NRF, 2023 (ISBN 978-2-07-303211-9)
Ce volume était impatiemment attendu par les violoncellistes (dont je suis dorénavant, en tant qu'humble amateur baroqueux). Non moins évidemment, le répertoire évoqué tourne autour de ces six "suites" de J.S. Bach pour violoncelle seul, écrites pour et retranscrites par Anna-Magdalena, qui vinrent fonder et consacrer l'incontournable ampleur de cet instrument dans cette tessiture (de baryton, grosso modo), pour devenir l'une des oeuvres incontournables de la musique occidentale. Dommage que l'auteur ne connaisse pas mieux l'apport apporté par la ré-étude de cette musique à la lumière de la redécouverte des fondements de la musique baroque.
Mais leur exhumation par Pablo Casals (dont est évoqué "le chant des oiseaux" p. 216) constitua un évènement majeur : c'est également par lui que je découvris ces suites il y a maintenant presque soixante ans (!), oeuvres qui ne m'ont plus jamais quitté... et qui furent à l'origine de ma décision de me consacrer dorénavant au violoncelle baroque.

Un roman antérieur :
- Mizubayashi Akira (1951-) – "Un amour de Mille-Ans " – Gallimard / Folio, 2017 (ISBN 978-2-07-278229-9)
Toujours sur la même trame, l'auteur évoque ici la rencontre d'une cantatrice, ou plutôt de sa voix de soprano. J'adhère volontiers au postulat énoncé ici par l'auteur : une belle voix féminine exerce (sur la plupart des hommes ?) un pouvoir quasi ensorcelant (p. 153-155). le roman tourne principalement autour des "Noces de Figaro" (Mozart), l'un des sommets de la musique occidentale. Les perspectives ouvertes par les remarques formulées pp. 87-88 sont d'une extrême justesse. Plus rigolo (pour moi), l'auteur évoque (pp. 162) un Lied de Schubert (Gute Nacht) que je suis précisément en train de travailler.

Par ailleurs, sans y insister, l'auteur révèle un peu de sa façon de travailler pour obtenir cette maîtrise ahurissante de la langue française : il rend hommage (p. 73) au "Petit Robert" puis explicite plus longuement (pp. 156-157) pourquoi et comment il se mit à l'apprentissage du français.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur ces romans, mais le plus simple, c'est encore de les lire, puis de les offrir autour de soi, à toute personne sensible de près ou de loin à la musique...

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Une écriture sobre, souvent onirique, pleine de poésie, de tranquillité et de sérénité pour traduire un amour profond entre deux êtres d'une grande sensibilité, unis dans une même passion pour les opéras de Mozart.

Une oeuvre de mélomane donnant des clés subtiles pour comprendre les Noces de Figaro, conjuguant esthétique du chant lyrique polyphonique, harmonie instrumentale et lecture politique.

Un hommage à la langue française, langue de l'amitié et de la littérature par excellence à travers le prisme de la culture japonaise.

Une réflexion sur le temps qui passe et la transformation du monde, des êtres et de l'amour.

Une lecture profondément émouvante.
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Un livre il y a plusieurs années.De très vagues souvenirs.


Un amoureux de la langue Française. Ce n'est pas tous les jours que l'on rencontre un écrivain Japonais qui écrit en Français avec une langue aussi poétique et un style très fin. Parlant plusieurs langues mais aucune à ce niveau, je dis chapeau à ce monsieur. Quel travail cela représente d'apprendre une langue à ce niveau et aussi l'on de son propre univers.

Un amoureux de musique. D'ailleurs tous ses romans sont autour et dans la musique.

Un amoureux de l'amour car il est toujours question de la vie qui passe et de l'amour.

Bref dès romans pour celles et ceux qui aiment se laisser porter et emporter dans des histoires où l'action a moins d'importance que le temps qui passe et les sentiments qui y sont attachés.

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Un amour de Mille-Ans, d'Akira Mizubayashi.

Il est certains auteurs dont on sait que la lecture sera un intense moment d'émotions, en plus d'un immense plaisir littéraire.
A mes yeux, Akira Mizubayashi fait partie de ces auteurs là.
J'ai eu le bonheur de le découvrir par le magnifique Âme brisée et j'ai eu beaucoup de joie à le lire, à nouveau, avec Mélodie, puis Reine de coeur.
J'avais donc hâté d'ouvrir Un amour de Mille-Ans.

Pour ne pas faire traîner le suspense, c'est d'un amour de livre, dont l'émotion me suivra longtemps. Peut-être pas pendant mille ans.

Quand on s'intéresse un peu à ce que l'auteur a laissé entrevoir de sa vie, on y voit, par moment, plus qu'une biographie. le narrateur, comme l'auteur, est d'origine Japonaise, s'est réfugié dans l'amour de la langue française pour s'écarter de la rigidité d'une certaine forme de politique japonaise. Il est passionné de musique, voue un attachement à un chien.

Là, le narrateur évoque sa femme, gravement malade, son amour pour l'opéra. Quand, par un message reçu, il va reprendre contact avec une passion de jeunesse, Les noces de Figaro en dénominateur commun.

Comme dans nombreux de ses livres, la musique est le personnage principal. L'auteur en parle merveilleusement bien. Et l'envie est présente d'écouter le morceau en parole. Les descriptions nous permettent de voir l'oeuvre.

Cette fois-ci, cette musique va se trouver liée à l'amour, dans tous les sens que ce mot peut prendre. L'auteur nous en parle avec cette magnifique sensibilité, cette délicate sensualité qui est son style d'écriture. Cela en devient Beau avec un B majuscule.
Il évoque aussi la perte. Et l'émotion, portée par les mots, nous saisit.

Il porte aussi un bel hommage à la langue française qu'il adore. D'ailleurs, Japonais, c'est bien en français qu'il écrit ses romans. Et de quelle magistrale façon! J'aime me laisser porter, tant par l'émotion, par l'élégance, que par la musique des mots. Il aime cette langue et, moi, j'adore quand il l'écrit.

Tout cela, à mes yeux, mène donc à un véritable coup de coeur. Vous savez. Ce sentiment de nostalgie au moment de fermer un livre. Ce signe qui montre qu'un roman nous a marqué.

Alors, je ne suis pas objectif. Peut-on l'être quand on nous demande de nous parler de l'émotion de la lecture? J'adore cet écrivain. Et ma lecture était déjà "orientée" (pas mal, pour le Japon). Cela dit, la barre placée si haute est franchie.

Et, surtout, j'ai eu la chance de rencontrer, récemment, Akira Mizubayashi. Il passait à 45 minutes de route de chez moi. Ce qui n'est rien devant la perspective de parler à un de mes auteurs préféré. J'ai donc eu l'occasion de l'écouter parler sur la thème de la musique et des livres. de me faire dédicacer mon livre. de me prendre en photo et d'échanger avec lui. le bonheur absolu d'un lecteur conquis.
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SEN-NEN (mille ans) est japonais, professeur de littérature française, passionné d'Opéra et des noces de Figaro de Mozart en particulier, qu'il a vu 11 fois consécutives dans sa jeunesse à Paris, pris de passion pour Clémence alors jeune cantatrice qui y incarnait Suzanne.
Il est marié à Mathilde, mélomane comme lui, une française qu'il a rencontré lors d'un stage de chant lyrique, avec laquelle il a partagé sa vie et fondé une famille. Alors que Mathilde est atteinte d'un mal incurable l'obligeant à garder son lit, il est contacté par Clémence de passage à Paris à l'occasion d'une représentation des Noces de Figaro, la revoir le plonge dans le passé de cet amour platonique et analytique de cet opéra qu'il met en parallèle chapitre après chapitre avec sa douce vie aux cotés de Mathilde, son âme soeur, comme une réponse polyphonique de l'amour.
Ce magnifique Roman est une ode à la musique, à l'opéra, à la langue française, à l'amour, à la vie, un éloge de la fidélité.
Akira Mizubayashi a construit ce roman comme un opéra, autour de thèmes qui lui sont chers tels que la musique, la langue française, la fidélité, les animaux.
Cet auteur délicieux écrit en français avec une sensibilité, une finesse japonaise. Dans un phrasé fluide et poétique. A découvrir absolument pour ceux qui ne le connaissent pas, son dernier roman « âme brisée» paru en 2019, est tout aussi vibrant.
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critiques presse (2)
LaCroix
28 avril 2017
Akira Mizubayashi raconte avec délicatesse une histoire d’amour et de musique, de vie et de mort.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Telerama
12 avril 2017
L'écrivain japonais signe son troisième roman en français. Une composition rare, portée par l'amour de la musique et d'une épouse trop tôt disparue.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Par la vertu d’une écriture créatrice d’un sentiment d’élévation, loin de toute coloration religieuse, Mozart a réussit à donner une substance réelle à l’idée de « bonheur de l’amour », comme il l’a fait d’une manière éblouissante au troisième acte pour la célébration du bonheur de la famille.
L’amour donc.
Mais pas l’amour-passion, qui s’use et qui ne se conserve que dans la mort (nous sommes loin de « Tristan et Isolde ! ») mais l’amour-compassion qui vous fait vivre dans l’autre, qui vous fait éprouver les joies de l’autre, qui vous fait subir les peines d’autrui, cet amour calme en deçà et au-delà des tourments connus des amants modernes, cet amour qui ignore l’attrait et la violence du nouveau et qui se renouvelle, se ressource dans la répétition, se réjouit purement et simplement de la présence de l’autre, me semble avoir trouvé sa place ici dans ce moment privilégié des « Noces » réservé à Suzanne.
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La « Sinfonia» commença
Les quatre croches suivies d’une noire et d’un soupir… puis douze croches suivies d’une noire et d’un soupir… puis vingt-quatre croches suivies d’une noire, d’un soupir et d’une demi-pause… tout cela joué presto par les cordes et les deux bassons jusqu’à l’entrée lumineuse des deux flûtes et des deux hautbois.
Sen-nen suivait la musique la partition ouverte.
Il lui semblait que la succession rythmée et structurée des notes suggérait le réveil progressif de deux corps enlacés qui, à l’aube, commencent à quitter leur immobilité dormeuse avant de remonter à la surface de la conscience claire.
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Le matin, la musique accompagnait Sen-nen dans le passage angoissant de la nuit au jour.
Le soir venu, elle l'aidait à accepter le monde du sommeil.
Pas un jour ne passait sans qu'il ne s'immergeât dans les eaux profondes de la musique s'élevant de la nuit précédente.
Pas une nuit ne s'achevait sans qu'il ne se laissât séduire par la clarté printanière de la musique surgissant de son être éveillé de la veille.
Souvent il se voyait debout sur un tapis volant et atterrissait doucement sur un immense disque 78 tours tournant à toute vitesse, tandis qu'il entendait les majestueux et ténébreux accords en ré majeur du premier mouvement du Concerto pour violon de Beethoven.
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- … J’aurais aimé devenir musicien. Le temps du désir et le temps de la capacité de répondre à ce désir ne coïncident que trop rarement. Dans mon cas, c’était trop tard quand la passion de la musique s’est allumée chez moi et a enflammé la moitié de mon cœur.
- La moitié ?
- Oui, la moitié. Parce que l’autre moitié s’est protégée contre le feu de la musique. Elle a été occupée par une autre passion, celle du français et de la littérature bâtie par cette langue. À défaut d’avoir un instrument adapté à mon désir, j’ai fait du français un instrument particulier si j’ose dire…
J’ai appris le français comme on apprendrait à jouer d’un instrument.
Le français, c’est le substitut de l’instrument de musique que je n’ai pas eu.
…. Je suis un musicien raté ….
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Ainsi se prolongeait leur conversation.
Le temps avançait en s’étirant ; il effaçait, en s’écoulant, la trace de son écoulement.
Dans un bistrot parisien, près de l’Opéra, blotti dans un pli de la ville immense, on voyait un homme et une femme occuper une petite table et parler, autour d’une pizza entamée, sans se sentir obligés de compter les heures.
Ils accueillaient en eux la présence bienveillante de l’autre et l’appréciaient comme un feu de bois qui vous réchauffe par un temps de grand froid.
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